CEDEAO/ Souveraineté et libre circulation : le cas de la préférence nationale au Ghana

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La préférence nationale ghanéenne, officialisée par des lois restrictives sur certaines activités économiques, soulève un paradoxe qui mérite d’être discuté, surtout lorsqu’elle contredit les idéaux et les ambitions de la Communauté Économique des États de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO). La CEDEAO promeut la libre circulation des personnes, des biens, et des services entre ses membres, rêvant d’une Afrique de l’Ouest sans barrières. Or, au Ghana, cette vision se heurte à une réalité où certains métiers sont réservés strictement aux Ghanéens.

Qu’on se le dise, la protection des emplois locaux et des produits de première nécessité n’est pas en soi un concept controversé. Les Ghanéens sont libres de vouloir que les taxis, la vente de denrées alimentaires, et le commerce de proximité restent entre les mains de leurs compatriotes. Cependant, lorsque cette préférence s’institutionnalise au point d’écarter les étrangers de manière systématique, cela pose une question centrale : cette loi respecte-t-elle vraiment l’esprit de la CEDEAO ?

L’existence de lois similaires dans d’autres pays de la région ne légitime pas nécessairement la politique ghanéenne, bien que cela puisse en atténuer la singularité. De nombreux États adoptent, de fait, des mesures protectionnistes, mais souvent de manière informelle ou non officielle, laissant les frontières du commerce ouvertement floues. Au Ghana, cependant, la préférence nationale est érigée en règle explicite, institutionnalisée au détriment des principes de la CEDEAO. Cette démarche, bien que transparente, pourrait être perçue comme une mise en garde à ceux qui espèrent construire une région où l’intégration prime.

Si le Ghana choisit de se soustraire à la libre circulation, il devrait le faire de manière responsable, en tenant compte des conséquences potentielles pour ses voisins et partenaires. Les 4,7 millions d’étrangers vivant au Ghana témoignent d’un pays attractif et stable, mais cette stabilité est-elle durable si la discrimination économique se renforce ? Les partenaires de la CEDEAO peuvent se montrer compréhensifs, mais pour combien de temps encore ?

Plutôt que de défendre une préférence nationale qui exclut, les États membres pourraient chercher à moderniser leur approche, permettant ainsi aux étrangers de contribuer sans être perçus comme une menace. Les législations devraient promouvoir la coopération économique et l’inclusion dans le respect des valeurs communes de la CEDEAO, pour qu’aucun État ne soit laissé pour compte dans l’intégration sous-régionale.

En fin de compte, le Ghana fait un choix courageux mais discutable. Il affirme ouvertement sa préférence nationale, mais ce faisant, il ignore le rêve collectif d’une Afrique de l’Ouest unie, une région où chacun, quelle que soit son origine, peut travailler et prospérer. À un moment où l’Afrique de l’Ouest a besoin de solidarité et de cohésion, cette loi peut être perçue comme un repli, un signal inquiétant pour l’avenir de la CEDEAO.

Koichiada

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