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Abidjan le 22 juin 2022- Au nom de ses pairs, Danho Paulin Claude président de l’union des villes et communes de Côte d’Ivoire (UVICOCI) par ailleurs ministre des Sports, a égrené une liste non exhaustive des maux qui minent leur administration.
« (…) De nombreux de défis se posent, aux collectivités et restent à relever. Le premier est relatif à l’épineuse et redondante question du transfert effectif des compétences de l’État aux collectivités territoriales avec les moyens humains, techniques et financiers correspondants. Pour rappel, sur la cinquantaine de décrets d’application attendus pour la mise en œuvre de la loi 2003-208 du 7 juillet 2003 relative au transfert et répartition des compétences de l’État aux Collectivités territoriales, seuls douze ont été, effectivement pris. Le second défi, concerne le statut de l’élu local qui porte sur l’ensemble des dispositions légales et règlementaires fixant ses droits et obligations. Dans notre pays, l’élu local est perçu, par nos concitoyens, comme un véritable porteur des actions sociales au quotidien, il est le premier et dernier recours face à la détresse des populations. Étant un maillon clé du développement de proximité, il se retrouve paradoxalement, confronté à une précarité juridique et sociale pendant et après l’exercice de ses fonctions. Il ne bénéficie pas de statut à la hauteur de son rôle d’acteur de développement, de premier plan susceptible de lui assurer la protection dans l’exécution de ses missions, car il ne dispose pas de couverture maladie pour lui et sa famille, pas d’allocations, pas de pension de retraite, pas de rente viagère. Il y a de toute évidence, urgence à définir et à adopter un statut de l’élu local en Côte d’Ivoire en changeant de paradigme, le bénévolat en cours doit laisser place à une fonction revalorisée et rémunérée. Sans cesse promis, jamais réalisé, le règlement de cette question constitue une très forte attente de nos conseils municipaux », ont dénoncé les élus locaux, par la voix du président de l’UVICOCI, le ministre Paulin Danho.

« Je pense qu’il faudrait que d’abord, l’Etat donne aux Collectivités locales ce qui leur revient. Parce qu’il ne s’agit pas de leur donner des compétences et de garder les ressources». A pour sa part renchéri Gervais Coulibaly préfet hors grade, dans une interview accordée à un site d’information. L’ancien patron de l’administration centrale, résume bien les innombrables problèmes que rencontrent les collectivités locales en Côte d’Ivoire depuis une décennie. Récemment lors d’une rencontre avec le ministre de l’Intérieur et de la sécurité, les maires et présidents de conseils régionaux, ont vidé leur sac.
Côté financement, c’est pire pour les collectivités territoriales. « Les difficultés sont multiformes et entières »
« A ce niveau, les difficultés sont multiformes et restent entières. Sur la proportion de budget alloué aux collectivités, notre pays reste à la traine comparativement aux pays de la sous-région. En effet, à ce jour, moins de 2% du budget du pays est alloué aux collectivités territoriales là où certains pays ont dépassé les 5%. L’autonomie financière des collectivités territoriales, devrait se traduire par une autonomie de gestion, une autonomie fiscale locale, ainsi qu’une participation financière accrue de l’État par des dotations ou des transferts d’impôts visant à compenser l’augmentation des dépenses des collectivités dans le cadre de la décentralisation. Pour favoriser une autonomie financière réelle des collectivités, il serait pertinent que le gouvernement mette en œuvre les mécanismes qui faciliteront une mise à disposition de ressources suffisantes destinées à la prise en charge par collectivités territoriales des compétences qui leur sont transférées. Notre pays, locomotive de l’économie sous régionale devrait se mettre en conformité avec les critères de convergence de I’Uemoa, notamment, la directive demandant l’affectation d’au moins 2,6 % du Budget des Etats aux Collectivités territoriales; restructurer la fiscalité locale en rendant transparent le niveau des ressources collectées ainsi que la clé de répartition des recettes fiscales. En effet, l’arrêté interministériel N 0285/MEMlS/MPMEF/MPMB du 21 juillet 2014 portant modalité de répartition de la quote-part des impôts rétrocédés aux collectivités territoriales au titre de la gestion 2014, bien que frappé d’obsolescence, continue d’être appliqué avec des résultats difficiles à interpréter ; adopter les contrôles à posteriori, uniquement afin de réduire les lourdeurs dans la gestion des activités des collectivités territoriales. Par ailleurs, le contrôle financier qu’on tend à instituer dans les collectivités non seulement vient dénier aux collectivités territoriales leur autonomie de gestion et leur libre administration, mais aussi leur créer désormais une seconde tutelle, en l’occurrence le Ministère en charge du Budget; mettre à la disposition des collectivités territoriales des subventions qui tiennent compte de leurs besoins ; relever à cinq cent millions (500.000.000) de francs CFA au moins, le seuil de soutenance des budgets des Collectivités territoriales devant le Préfet de chaque département; faciliter l’accès des collectivités territoriales aux emprunts pour le financement de leurs projets conformément au décret existant ; relever le niveau du seuil des marchés publics devant faire l’objet d’appel d’offre à cent millions (100.000.000) ». Réclament les maires et présidents de conseils régionaux.
Ceux-ci veulent bénéficier en bonne et due forme des subventions de l’État, gérer directement la gestion des déchets et renforcer leurs capacités et celles de leurs agents. « La quatrième préoccupation porte sur le besoin de renforcement des capacités des différents acteurs (élus, agents municipaux..), la création de la fonction publique territoriale et la refonte du cadre organique des emplois. Sur la question du cadre organique, il serait bon d’endosser la qualité du personnel à recruter sur la capacité financière de la commune et non sur la taille de la population. Quant au Renforcement des capacités, il est une exigence préalable pour toute administration qui se veut compétitive, efficace et efficiente. En effet, autant les élus locaux issus de plusieurs formations se trouvent confrontés à des difficultés de gestion des communes, autant nos collaborateurs ont besoin de voir leurs capacités être renforcées de façon permanente pour un meilleur rendement. La cinquième préoccupation est quant à elle relative à la gestion des déchets, autre défi majeur pour les maires de Côte d’Ivoire. En effet, depuis 2018, les autorités municipales ne sont plus légalement compétentes en matière de collecte de déchets, curage des caniveaux et de nettoyage des rues en vertu du décret n°2017-692 du 25 octobre 2017 portant création, attribution et fonctionnement de l’établissement public à caractère industriel et commercial dénommée Agence nationale de gestion des déchets (Anaged). Pour autant, les maires sont contraints d’assurer, par tous les moyens, la qualité du cadre de vie de leurs concitoyens avec d’énormes difficultés. Le sixième défi, concerne l’efficacité de la coopération décentralisée qui est mise à rude épreuve par une taxation douanière et portuaire disproportionnée pour laquelle nous suggérons une exonération ciblée. En tant qu’Association d’utilité publique, les faîtières ne bénéficient pas des subventions de l’État. Il est souhaitable que cette omission soit corrigée pour renforcer l’efficacité de I’Uvicoci et I’Ardci. »
Denzel Bereby, Correspondant
Akondanews.net