Regain de tension entre l’ex-métropole et l’ex-colonie : Le Mali rompt l’accord de défense avec la France, avec «effet immédiat »

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Abidjan le 3 mai 2022- Signé le 16 juillet 2014 entre la République française et la République du Mali, le Traité de Coopération est en passe de devenir une simple paperasse bonne pour la corbeille ou les archives, c’est selon. Dans un communiqué de presse lu à la télévision nationale le lundi 2 mai 2022, par le porte-parole du gouvernement, le colonel Abdoulaye Maïga, le Mali dénonce « les atteintes flagrantes » de la part des forces françaises présentes et les « multiples violations » de son espace aérien.

Ce Traité stipule entre autres, « l’égalité souveraine des Etats et de leur intégrité territoriale ». On y lit surtout :

Une vue des Frorces Françaises au Mali

Article 1er Définitions dans le présent traité, l’expression :

a) « forces » désigne tout corps, contingent ou détachement constitué de personnels appartenant aux armées de terre et de l’air, à la marine nationale, à la gendarmerie nationale, à la garde nationale malienne, ainsi qu’aux services de soutien interarmées ;

b) « membres du personnel » désigne le personnel appartenant aux forces de l’une des Parties ainsi que le personnel civil de l’une des Parties employé par les ministères compétents dans les domaines de la défense et de la sécurité, présent sur le territoire de l’autre dans le cadre du présent traité, à l’exclusion des ressortissants et des résidents permanents de l’Etat d’accueil ;

c) « personne à charge » signifie le conjoint ou toute autre personne vivant maritalement avec un membre du personnel, ainsi que ses enfants mineurs, conformément à la législation respective des Parties ;

d) « matériel » désigne les biens, équipements des forces, y compris les armes, munitions, véhicules militaires et tout autre moyen de transport ;

e) « Etat d’origine » signifie la Partie dont relèvent les membres du personnel qui se trouvent sur le territoire de l’autre Partie ;

f) « Etat d’accueil » signifie la Partie sur le territoire de laquelle se trouvent, en séjour ou en transit, les forces ou les membres du personnel de l’Etat d’origine.

I. Principes généraux de la coopération en matière de défense

Article 2 Objectifs de la coopération

1. Par le présent traité, et dans le respect de leurs engagements internationaux, les Parties s’engagent dans une coopération en matière de défense, de concourir à une paix et une sécurité durables sur leur territoire, notamment par la sécurisation des espaces frontaliers et la lutte contre le terrorisme, ainsi que dans leur environnement régional respectif,

2.Dans la perspective de la constitution de la force africaine en attente, les Parties peuvent décider d’un commun accord d’associer les contingents nationaux d’autres Etats africains à certaines activités initiées dans le cadre du présent traité, en concertation avec les organisations régionales concernées,

3. L’Union européenne et ses Etats membres peuvent être invités par les Parties à s’associer aux activités prévues par le présent traité. Les modalités de cette participation sont précisées dans des accords particuliers conclus par les Parties avec l’Union européenne et toute organisation ou Etat concerné.

Article 3 Principes de la coopération

1. Aucune disposition du présent traité ne déroge aux droits et obligations qui seraient reconnus à une force ou à un membre du personnel de l’une des Parties à raison de sa participation à une opération de maintien de la paix sous mandat de l’Organisation des Nations unies.

2. Les forces et les membres du personnel de l’Etat d’origine respectent les lois et règlements de l’Etat d’accueil et s’abstiennent de tout comportement incompatible avec les objectifs du présent traité.

Article 4 Domaines et formes de la coopération

1. Par le présent traité, les Parties mettent en œuvre une coopération qui peut couvrir les domaines suivants :

a) Echanges de vues et d’informations relatifs aux vulnérabilités, risques et menaces à la sécurité nationale et régionale ;

b) Organisation, équipement et entraînement des forces, le cas échéant par un soutien logistique pouvant se concrétiser par la cession gratuite ou onéreuse de matériels et équipements militaires, ainsi que l’organisation d’exercices mixtes et conjoints ;

c) Organisation de transits, de stationnements temporaires, d’escales aériennes ;

d) Organisation et conseil aux forces par la mise en oeuvre d’actions de formation et de soutien technique, et la mise à disposition de coopérants militaires techniques français

e) Formation des membres du personnel malien par leur accueil ou leur admission en qualité d’élève ou de stagiaire dans les écoles de formation militaires françaises ou soutenues par la France ;

f) Toute autre activité convenue d’un commun accord entre les Parties en fonction de leurs intérêts communs. »

Avaient conclu les autorités maliennes et françaises en juillet 2014.

Mais au constat des faits, sept années après la signature dudit traité, la partie malienne regrette les « atteintes flagrantes » de la part de la France, « l’attitude unilatérale » de la France lorsqu’elle a suspendu en juin 2021 les opérations conjointes entre les forces françaises et maliennes, l’annonce en février 2022, « encore sans aucune consultation de la partie malienne », du retrait des forces Barkhane et Takuba, et les « multiples violations » de l’espace aérien par les appareils français malgré l’instauration par les autorités d’une zone d’interdiction aérienne au-dessus d’une vaste partie du territoire.

Manifestation anti-forces françaises au Mali

 

Pour ces motifs qu’il juge suffisamment graves, le gouvernement malien par la voix de son Porte-parole le colonel Abdoulaye Maïga déclaré : « Eu égard à ces insuffisances graves ainsi qu’aux atteintes flagrantes à la souveraineté nationale du Mali, le gouvernement de la République du Mali décide de dénoncer le traité de coopération en matière de défense du 16 juillet 2014 ».

Cette décision de dénonciation du Sofa de mars 2013 qui encadre l’engagement de la force française Serval, et Barkhane, sans oublier le protocole additionnel de mars 2020 lequel s’applique aux détachements européens de Takuba, tout comme le regroupement d’unités spéciales européennes initié par la France, prise par les autorités maliennes prend « effet immédiat » dès ce lundi 2 mai 2022.

C’est un autre revers diplomatique que la France essuie après l’expulsion de Bamako, le lundi 31 janvier 2022, de son ambassadeur. Dans une déclaration lue à la télévision d’Etat ce jour-là, les autorités maliennes, décidaient d’expulser l’ambassadeur de France Joël Meyer, en poste depuis 2018. Il est reproché à ce dernier des « propos hostiles et outrageux du ministre français de l’Europe et des Affaires étrangères tenus récemment » et « la récurrence de tels propos par les autorités françaises à l’égard des autorités maliennes en dépit des protestations maintes fois élevées ». C’est pourquoi, « Le gouvernement de la République du Mali informe l’opinion nationale et internationale que ce jour (…) l’ambassadeur de France à Bamako, son excellence Joël Meyer, a été convoqué par le ministre des Affaires étrangères et de la coopération internationale (et) qu’il lui a été notifié la décision du gouvernement qui l’invite à quitter le territoire national dans un délai de 72 heures », avait en effet, annoncé un communiqué lu par la télévision RTM.

La France a maille à partir avec certains Etats de l’Afrique dont la plupart ont acquis leur indépendance sur papier, officiellement, dans les années 1960. Mais ces Etats dit souverains souffrent le martyr lorsqu’ils évoquent leur indépendance totale et leur pleine souveraineté. Tous sans exception, ont subi ou continuent de subir des coups d’Etat et voient leurs dirigeants les plus nationalistes et patriotiques renversés du Pouvoir avec l’aide de la France ancienne métropole. Tous ont un Accord de défense ou de coopération militaire qui énonce clairement la présence de l’armée française sur leur territoire pour les défendre en cas d’attaque, mais en réalité c’est cette même armée française qui s’érige en force ennemie pour renverser le dirigeant ou le régime que la France accuse de menacer ses intérêts.

En fait d’intérêts, il s’agit des ressources naturelles de ces Etat exclusivement réservées à la France, pour lesquelles les entreprises françaises signent des contrats léonins, passent des passés sans appels d’offres. Une donne qui retarde le développement, car faut-il le noter, la quasi-totalité des Etats, anciennes colonies françaises sont les plus pauvres de la planète.

Denzel Bereby

akondanews.net

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