Quels sont les enjeux de la loi sur « l’Ecole pour Tous » ?

Lecteur Audio

Le secteur éducation-formation constitue un enjeu majeur pour tous les pays du monde.

En effet, selon la Banque mondiale, en plus d’être un droit fondamental, l’éducation demeure « un puissant vecteur de développement et l’un des meilleurs moyens de réduire la pauvreté, d’élever les niveaux de santé, de promouvoir l’égalité entre les sexes et de faire progresser la paix et la stabilité » .
Sous ce rapport, elle demeure « un puissant facteur de changement » car elle est susceptible de contribuer à une meilleure santé et ainsi d’améliorer la productivité des moyens de subsistance. C’est dans ce contexte que Nelson Mandela a dit : « L’éducation est l’arme la plus puissante que l’on puisse utiliser pour changer le monde »
Conscient du fait que la formation du capital humain demeure le principal ingrédient « de la transformation et de la compétitivité de l’économie », afin de « répondre aux besoins actuels et futurs de l’économie », l’Etat ivoirien décida de décréter, le 17 septembre 2015, la loi de « l’Ecole pour Tous » suite aux « fortes disparités spatiales, socio-économiques et de genre » dans ce secteur que l’on a constatées au sortir de la crise politico-militaire de 2002 à 2011. Cette loi rend obligatoire la scolarisation pour tous les enfants des deux sexes, âgés de six à seize ans.
Toutefois, en dépit de la pertinence d’un tel dispositif législatif, parce que la scolarisation est un droit inaliénable, on est en droit de se demander si cette loi seule, effective au niveau primaire, va suffire pour assurer la mission fondamentale de l’école qui est : « instruire, socialiser et qualifier les élèves ». Ne faudrait-il pas agir sur les trois (3) niveaux du secteur ?
D’abord, on sait que l’école vise à « préparer les enfants à la vie, à leur vie sociale et à leur vie personnelle; elle les conduit d’une part vers leurs futurs métiers dont elle assume, le moment venu, l’apprentissage, d’autre part vers leur accomplissement individuel, en essayant de les révéler chacun à soi ».
Or, s’il est un fait qui n’est plus à démontrer, c’est que l’Etat, est déjà confronté à des effectifs pléthoriques dans les classes car disposant de moyens limités en termes d’infrastructures et d’enseignants. Alors, il va sans dire qu’il va de plus en plus se heurter à une difficulté majeure, celle de la qualité de la formation .
Avec un taux brut de scolarisation primaire d’environ 94%, il est évident qu’à moyen terme, il va se poser le problème de qualité donc de rendement interne, notamment l’acquisition de connaissance et l’abandon scolaire, entre autres.
Ensuite, le coût élevé des dépenses liées à l’éducation est certainement un frein à l’atteinte des objectifs de cette loi.
Avec une estimation de dépenses d’environ 75 000 FCFA comparées au faible revenu moyen des familles des plus pauvres, il a été conclu que « une part conséquente de la population » sera privée d’accès à l’éducation.
Enfin, il y a que le système éducatif, dans son ensemble, ne favorise pas « l’acquisition de compétences plus complexes et spécifiques à destination du marché du travail ».
Par conséquent, il se pose le problème d’employabilité et d’insertion professionnelle, donc d’efficacité externe, surtout au niveau secondaire et tertiaire.
Ainsi, il apparaît que la loi de « l’Ecole pour Tous », même si elle est arrivée à-propos pour régler, par la base, le problème d’inclusion et d’employabilité des diplômés, ne pourra pas, à terme, atteindre cet objectif, à moins qu’elle n’articule les trois (3) niveaux éducatifs, c’est-à-dire le primaire, le secondaire et le supérieur et qu’elle n’agisse concomitamment sur les 3 leviers ; auquel cas, la problématique du chômage, du sous-emploi et de l’emploi précaire des diplômés ne pourra que gagner en ampleur or, c’est justement ce que les autorités éducatives voulaient combattre en instituant cette loi.

Oussou Kouamé Rémi, Enseignant-chercheur à l’Université Alassane Ouattara-Bouaké et Doyen du Campus 2 de l’université internationale Clairefontaine- Expert en emploi et employabilité de l’étudiant

Akondanews.net

4/5 - (1 vote)
Partager:

Laisser un commentaire

Traduire»