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La rencontre entre le chef de l’Etat M. Alassane Ouattara et le président Laurent Gbagbo le 27 juillet dernier, continue de faire des vagues. Les avis sont partagés quant à l’opportunité et à la portée réelle de cette rencontre.
Au-delà des sourires affichés, des accolades et d’autres amabilités dont on a eu droit, que peut-on réellement attendre de cette rencontre ?
Il est trop tôt pour répondre de façon convaincante à cette question, mais la rencontre eu le mérite d’avoir eu lieu et doit être saluée. Elle était inimaginable quelques temps en arrière et permet (espérons-le) de briser le mur de méfiance qui s’était installé entre les deux hommes mais surtout de détendre un tant soit peu, l’atmosphère d’animosité qui règne entre leurs partisans.
Si le dialogue se poursuit et qu’on parvient à une paix des braves, chaque entité pourra apprécier à sa juste valeur, le bénéfice qu’elle en tire.
Depuis 2011, année de son accession au pouvoir, le RDR devenu RHDP vit et agit comme une tribu assiégée. La hantise de la perte du pouvoir et les lendemains incertains qui l’accompagneraient, l’obligent à toujours adopter une posture de belligérance en toute situation. Il bande les muscles à tout va, considère toute revendication de l’opposition comme une provocation, à laquelle une fin de non-recevoir est la réponse appropriée. Et si l’opposition persiste et tient à s’exprimer comme on le ferait dans un état démocratique, à travers marches, meetings ou sit-in, alors policiers, gendarmes et… « microbes » s’adonnent à cœur joie pour disperser, réprimer, emprisonner et même…
Cette situation est intenable pour le pouvoir lui-même et ne peut continuer éternellement. A trop vouloir tirer sur la corde, elle finira à coup sûr par se casser, et nul ne peut imaginer les conséquences qui en découleront.
De ce fait, le parti au pouvoir, quoi qu’on dise, a besoin d’une situation apaisée et une convergence de vue avec les ivoiriens dans leur entièreté, sur les problèmes qui divisent, à l’effet de pouvoir dérouler son programme de gouvernement. Le règne par la force et par la contrainte, ne permet nullement à celui qui les détient de mener une vie paisible et tranquille. Le RHDP et le pouvoir qui en est issu, doivent s’en convaincre et lâcher du lest pour que les problèmes qui divisent soient abordés sereinement, et des pistes de solutions soient recherchées. Ce parti doit se faire aussi à l’idée que les passages en force ne règlent pas les problèmes, ils ne font que les déplacer.
L’opposition de son côté, doit ajouter un peu d’eau à son vin, pour donner une chance d’avoir une atmosphère propice à toutes les discussions. Elle a dû se rendre compte que ses contestations de l’élection présidentielle de 2020, des résultats qui en sont issus, de la légalité et de la légitimité du pouvoir actuel, se sont heurtées au parapluie de l’indifférence de ceux qui régentent ce monde, qui y ont même trouvé des éléments de justification, juste du fait qu’elle n’ a pas pu modifier le rapport de force et influer sur le cours de l’histoire.
A son corps défendant, elle doit se rendre à l’évidence de qui dispose de l’effectivité du pouvoir et qui représente le pays dans les instances internationales. Le reconnaitre n’est nullement un aveu de faiblesse, encore moins un renoncement à la lutte pour plus de démocratie dans le pays.
Il s’agit de jeter les bases d’échanges à même de faire évoluer les choses dans un esprit de donner et de recevoir.
C’est certain, des partisans de l’opposition et du parti au pouvoir sont remontés par la rencontre du 27 juillet parce que beaucoup estiment à tort ou à raison, que les responsables des milliers de morts de la crise de 2010 n’ont pas été punis et cela donne l’impression d’une prime à l’impunité. C’est peut-être vrai, mais au stade où se trouve le pays, une seule alternative s’offre à lui :
– Soit continuer dans les invectives, la belligérance et les affrontements (physiques)
– Soit se parler sincèrement pour laisser une chance au dialogue.
En tout état de cause, le souhait qu’on peut émettre, c’est qu’une suite soit donnée à cette rencontre. Et la prochaine devrait réunir Bédié, Gbagbo et Ouattara et plus tard l’élargir à toute la classe politique ivoirienne.
Il n’y a qu’à ce prix que les choses évolueront. Pour ce faire tout le monde doit mettre balle à terre et donner la chance à demain. Demain est certes un autre jour, mais demain arrive toujours. Et s’il y a eu un matin en Eburnie, il y aura assurément un soir et l’ivraie sera séparée du vrai.
NAZAIRE KADIA, Analyste politique