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Yaoundé le 16 juillet 2021- Recevant un émissaire du chef de l’Etat Paul Biya, au palais présidentiel d’Abuja, le président Muhammadu Buhari a affirmé sa détermination à soutenir Yaoundé dans son combat contre les séparatistes dans les régions du Nord-ouest et du Sud-ouest.
Alors que la situation sociopolitique reste inquiétante dans les régions dites anglophones au Cameroun, le Nigéria, pays voisin qui d’une manière ou d’une autre vit les affres de cette crise, vient de se décider à accompagner Yaoundé dans ses efforts afin de venir à bout à cette crise, devenue ennemi commun.
Le président Muhammadu Buhari a clairement exprimé cette volonté au ministre délégué auprès du ministre des Relations extérieures chargé du Commonwealth Felix Mbayu, envoyé spécial du président Paul Biya qu’il a reçu en audience en début de semaine à Abuja. Le Nigéria va «veiller à ce que le Cameroun soit stable, et nous vous soutiendrons sans relâche », a déclaré le président nigérian à l’émissaire de son homologue Paul Biya. Une mesure qui intervient à l’approche de la présidentielle au Nigéria et dans un contexte où ce pays voisin du berceau de nos ancêtres venait d’intégrer dans son budget 2022, un projet relatif à la construction d’un port en eau profonde à Bakassi.
C’est un territoire riche en gaz et pétrole à la frontière ayant fait objet d’un conflit entre Yaoundé et Abuja avant l’arbitrage de la Cour internationale de justice qui donnait gain de cause au Cameroun. Cette décision aussi est prise au moment où les autorités de Yaoundé sont engagées dans la résolution de la crise dans les régions en conflit à travers la mise en œuvre du processus de parachèvement de la décentralisation entre autres. Après le statut spécial accordé aux régions du Nord-ouest et du Sud-ouest, décidé lors du Grand Dialogue National tenu en 2020, le président Paul Biya a nommé les « Public Independent Conciliators » dont le rôle est de défendre et de protéger les droits et libertés des citoyens de leurs régions respectives.
Dans ses prises de position lors des rencontres internationales au sujet de la situation sociopolitique du pays, le Cameroun n’a eu de cesse d’appeler à une convergence de forces dans la gestion de cette crise qui selon Yaoundé, perdure en raison de la main invisible de certains compatriotes basés à l’étranger. Le Nigéria qui partage avec le Cameroun une frontière commune de près de deux mille Kilomètres (2000km) notamment dans les régions en crise semble avoir pris conscience de la situation qui forcément pourrait avoir quelques incidences sur son territoire.
Toutefois, si le contexte sied pour une telle initiative des préoccupations demeurent quant à son opportunité à une période au cours de laquelle Abuja entend bientôt lancer les travaux de construction d’un port en eau profonde dans la péninsule de Bakassi et vient d’accréditer à Yaoundé, un militaire (un ancien chef d’état major des armées) comme nouvel un haut Commissaire du Nigéria au Cameroun. Simple solidarité ou conditionnement de l’histoire et la géographie du pays de Yacoubu Gowon ?
Ce nouvel acte de rapprochement serait-il considéré comme une répétition de l’histoire ? Surtout lorsqu’on sait que le Cameroun a contribué aux côtés du Nigéria dans la guerre du Biafra qui n’est toujours pas une page tournée. Il convient aussi de relever que malgré l’arrêt de la Haye sur le conflit de Bakassi, le pays de Buhari a toujours manifesté son désir d’exploiter les richesses de cette riche péninsule.
D’ailleurs, le pays n’a pas arrêté d’occuper certaines portions territoriales de cette zone malgré le retrait officiel du 14 août 2008.
Bien plus, le Cameroun et le Nigéria entretiennent une dense coopération bilatérale notamment dans les domaines de l’économie et de la sécurité. Les échanges commerciaux sont importants et les deux pays travaillent de commun accord dans le cadre de la Force Multinationale Mixte (FMM) qui est engagée dans la lutte contre les terroristes de Boko Haram.
Sur cet aspect, on pourrait donc comprendre que le soutien annoncé d’Abuja au Cameroun entre également dans la sécurisation de son territoire dans l’optique d’éviter de servir de base arrière aux groupes armés qui sévissent à la fois en zone anglophone et dans le golfe de Guinée. Ce qui constituera certainement une menace pour le projet portuaire dont la construction est envisagée.
YVES MODESTE NGUE