Par Ello De Marie, 30 juillet 2023
Dans les pages méconnues de l’histoire africaine se trouve un trésor du savoir qui a marqué les esprits bien avant certaines des universités les plus prestigieuses du monde. Il s’agit de l’Université Sankoré de Tombouctou, une institution d’enseignement renommée qui a prospéré au cœur de l’Empire du Mali dès 1324, soit près de 300 ans avant l’établissement de l’Université de Harvard.
Lorsque l’Empire du Mali prit le contrôle de la ville de Tombouctou, sous le règne éclairé de Mansa Musa, une ère d’éducation et de progrès commença à briller dans la région. Sur l’initiative de ce souverain visionnaire, la construction de la première grande mosquée de Sankoré et de la magnifique Jingeray Masjid à Ber débuta en 1327. Ces prouesses architecturales témoignaient de la volonté de l’Empire de créer une institution de formation de classe mondiale.
Mais l’histoire de Sankoré remonte encore plus loin, aux fondations d’une structure préexistante en 988, érigées par ordre du juge en chef de la ville, Aqib ibn Umar ibn Mahmud. L’essor de cette université fut rendu possible grâce au généreux financement d’une dame locale, dont la richesse soutint le projet de transformer Sankoré en un centre d’apprentissage compétitif. Dans cet élan, la cour de la mosquée fut bâtie avec des dimensions identiques à celles de la Kaaba à La Mecque, respectant scrupuleusement ses mesures sacrées.
Tombouctou, un carrefour incontournable pour les marchands en provenance du Moyen-Orient et de l’Afrique du Nord, était fréquentée par de nombreux musulmans. La mosquée de Sankoré devint rapidement un centre de culte, attirant continuellement des visiteurs. Elle devint également un pôle d’attraction pour les livres, qui devinrent la marchandise la plus précieuse de la ville. Des bibliothèques privées furent aménagées dans les demeures des érudits locaux, contribuant ainsi à la propagation du savoir.
À partir du XIVe siècle, la mosquée de Sankoré fut transformée en une madrasa, une école coranique, dotée de la plus grande collection de livres en Afrique depuis l’époque de la Bibliothèque d’Alexandrie. Le niveau d’apprentissage dispensé à l’Université Sankoré dépassait alors celui de tous les autres centres islamiques du monde. Incroyablement, elle pouvait accueillir jusqu’à 25 000 étudiants, et sa bibliothèque, une des plus grandes au monde, comprenait entre 400 000 et 700 000 manuscrits.
L’organisation de l’Université Sankoré se distinguait grandement de celle des universités européennes médiévales. Elle avait une administration centrale indépendante de l’empereur et n’enregistrait pas de dossiers d’étudiants. Au lieu de cela, elle conservait les œuvres publiées par ses étudiants. L’université était composée de plusieurs écoles autonomes, où chaque étudiant était associé à un enseignant particulier. Les cours étaient dispensés dans la cour de la mosquée ou dans des résidences privées.
Le programme d’études de Sankoré, divisé en quatre niveaux, était couronné par l’attribution d’un turban à chaque étudiant, symbolisant les connaissances acquises. L’école n’était pas laïque et se référait aux enseignements du Coran, mais elle incluait également des matières laïques, tels que la géométrie et les mathématiques, favorisant ainsi le développement d’individus polyvalents et bien formés.
L’héritage de l’Université Sankoré témoigne de la richesse du savoir africain et de l’importance de son rôle dans l’histoire de l’éducation mondiale. Les générations futures devraient s’inspirer de cette épopée du savoir africain, célébrer ce trésor oublié, et chercher dans leurs histoires une source d’inspiration pour façonner un avenir éclairé. Nourris de notre passé, informons-nous, cultivons-nous vivants, et célébrons cet héritage inestimable.