Les chats vont-ils envahir le monde ?

« Ne serait-ce que pour Demain les chiens, Clifford Simak mérite de rester dans l’histoire littéraire », écrivait Michel Houellebecq en 2002. Ces contes dans lesquels des chiens du futur se racontent des histoires d’hommes disparus font partie des classiques de la science-fiction. Mais peut-être aurait-il mieux fait d’écrire« Demain les chats », tant nos chers félins envahissent peu à peu la planète, dévorant au passage bon nombre des espèces qui s’y trouvent.

Les chats vont-ils envahir le monde ? On peut vraiment se poser la question ! On en recense plus de 600 millions à travers la planète, dont plus de 106 millions aujourd’hui en Europe. Sachant qu’un couple de chats errants non stérilisés peut engendrer jusqu’à 20 000 descendants en quatre ans, la population mondiale de ce superprédateur domestiqué par l’homme il y a 10 000 ans de cela en Afrique croît de façon quasi exponentielle. Que voulez-vous, ils sont tellement mignons… Dans l’Hexagone, 600 000 chatons naissent chaque année. Rien qu’en France, leur nombre a augmenté de près de 40% en quelques années, selon les chiffres de la Fédération des fabricants d’aliments pour chiens, chats et oiseaux. D’après l’ONG One Voice, on compterait environ 11 millions de chats errants dans l’Hexagone, en sus de 15 à 18 millions de chats domestiques vivant chez des particuliers. Et encore, ces chiffres sont sans doute sous-estimés.

Mais domestique ou non, un chat est et demeure un prédateur. Et il constitue à l’heure actuelle l’une des premières menaces qui soient pour la biodiversité. Car non content de tuer pour se nourrir, notre félin adoré tue aussi pour jouer. On estime qu’un chat bien nourri peut capturer en moyenne 27 proies par an, contre 273 pour un chat errant, et plus d’un millier pour un chat domestique retourné à l’état sauvage… De quoi faire des ravages dans les jardins, et même en ville. D’après les résultats d’une étude du Smithsonian Migratory Bird Center américain, les chats seraient directement responsables de l’extinction de 63 espèces. Ils tuent des milliards d’oiseaux et de mammifères chaque année. Plus près de nous, la Société française pour l’étude et la protection des mammifères a recensé pas moins de 200 espèces prédatées par le chat. Selon la Ligue de Protection des Oiseaux, en France, chaque année, les chats seraient responsables de la mort d’au moins 75 millions d’oiseaux.

Alors que l’on ne cesse de parler d’écologie, l’influence des animaux domestiques sur l’environnement devient donc un véritable enjeu. Plus encore en France qu’ailleurs, notre pays étant le deuxième pays à posséder le plus de chats domestiques, et même le premier en termes de ratio, avec plus d’un chat pour cinq habitants. Si accrocher une clochette au collier des chats permettra déjà de sauver quelques-unes des proies potentielles de ce tueur silencieux, le plus important est de stériliser son chat pour éviter toute portée de chatons en pleine nature. Conséquence indirecte : les chats errants sont désormais dans le collimateur des chasseurs. Le président de la Fédération nationale des Chasseurs a d’ailleurs proposé de piéger tout chat errant se trouvant à plus de 300 mètres des habitations afin de protéger la biodiversité en danger… Les chasseurs n’apprécient pas la concurrence de ce carnivore taillé pour la chasse, rapide, musclé et bien armé. Un chasseur par instinct, véritable fauve miniature. Un chat de propriétaire consacre en moyenne 3 heures par jour à la prédation, contre 12 heures par jour pour un chat errant. Des communes ont pour leur part déjà initié des campagnes de stérilisation afin de réduire la population de chats errants. On estime le coût de la stérilisation et de la pose d’une puce d’identification à 60 euros pour un mâle et 80 euros pour une femelle. Un vrai coût pour les municipalités, qui font du chat le nouvel ennemi public, voire un animal invasif. Mais bon courage à celui qui tenterait, en France, de classer nos boules de poil préférées comme espèce nuisible…

source: LSDJ(Judikael Hirel)

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