Le SNUS, ce tabac à sucer qui envahit la France

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Fumer des cigarettes, c’est déjà dépassé. Comment rendre dépendante une nouvelle génération de consommateurs ? L’industrie du tabac a trouvé comment faire : promouvoir le SNUS, un tabac à sucer consommé depuis longtemps par plus d’un million de Suédois. Depuis maintenant quelques mois, ces sortes de chewing-gum au tabac à glisser entre la lèvre et la gencive s’invitent à l’école comme en soirée. Il faut dire que l’industrie du tabac profite de la jungle juridique des réseaux sociaux pour en faire largement la promotion, principalement via TikTok et Snapchat, cible jeune voire mineure oblige : 78% des visiteurs quotidiens de TikTok se situent dans la tranche 11-24 ans. La portée mondiale de ces réseaux permet au passage de ne pas se soucier, ou presque, des législations locales quand il s’agit de communiquer, et même de vendre directement ces nouveaux dérivés du tabac. Sur TikTok, le mot-dièse #snus renvoie déjà à plus d’un milliard de visionnages de vidéos… Du côté de Snapchat, les revendeurs déploient tout leur art du marketing pour vendre leurs sachets, n’hésitant pas à faire appel à des stars mondiales du football telles que Karim Benzema, Zlatan Ibrahimovic ou Marcus Thuram pour les promouvoir. De quoi accélérer l’engouement, en jouant sur le goût de la nouveauté.

Pourtant, le SNUS est interdit à la vente en Europe, hors Luxembourg et Suède, depuis 1992. Ce qui n’empêche pas de le retrouver jusque dans les cours de récréation de l’Hexagone dès le collège. Contrairement à la cigarette traditionnelle, son mode de consommation discret et l’effet immédiat du fait d’une forte concentration en tabac y font fureur. Il suffit de quelques clics pour s’en procurer en ligne et se le faire livrer. D’apparence cool et branché avec son packaging coloré, son prix plus abordable que celui d’un paquet de cigarettes (3 à 7 euros) contribue aussi à son succès. Une fois sorti d’une boîte faisant penser à celle des tabacs à priser de jadis, le SNUS ressemble à un chewing-gum. Il marie une pâte contenant de fines lamelles de tabac à de l’eau, du sel, du carbonate de sodium, et bien souvent un arôme (Cola, fraise, menthe..) fait pour séduire de jeunes palais. Bien vu : outre-Atlantique, plus de 80% des jeunes ayant consommé des produits du tabac et de la nicotine déclarent avoir commencé avec un produit aromatisé.

Avec le SNUS, le danger est réel, et la dépendance rapide. Ainsi consommée en étant sucée, la nicotine entre directement dans l’organisme. Aussi addictif que cancérigène du fait de son taux de nicotine élevé, ce véritable shoot de nicotine a des effets comparables à ceux d’un joint de haschich : le dosage en nicotine peut atteindre vingt milligrammes par sachet, contre environ trois pour une cigarette. Une boîte de sachets contient ainsi autant de nicotine qu’une soixantaine de cigarettes, un sachet sucé pendant quelques dizaines de minutes équivalant à trois à six cigarettes en termes de dosage. Migraines, nausées, vomissements et palpitations sont à craindre, certains jeunes consommateurs ayant même directement fini aux urgences, suite à une surdose de nicotine. Par ailleurs, sur le long terme, comme le souligne notamment Génération sans Tabac, la consommation de SNUS expose aux mêmes maladies que les fumeurs (risques accrus de cancer, d’infarctus…). À cela s’ajoutent une irritation de la gorge et des bronches, des lésions aux muqueuses de la bouche et une rétraction irréversible des gencives du consommateur.

Nouveau produit, mais vieilles méthodes… Cette nouvelle façon de consommer du tabac constitue clairement une porte d’entrée vers la cigarette, et non une alternative moins nocive. La preuve : le SNUS est notamment vendu aux États-Unis sous les marques Camel et Marlboro ! L’industrie du tabac n’hésite pas, pour défendre et promouvoir sa consommation, à utiliser les mêmes armes mensongères que celles utilisées jadis pour légitimer le fait de fumer. Les fabricants de SNUS investissent massivement dans la promotion de ces nouveaux produits : on parle de plus d’un milliard d’euros dépensé sur les réseaux sociaux et en partenariats événementiels en 2021 par le géant British American Tobacco. Selon l’association suisse pour la prévention du tabagisme « AT Suisse », « la publicité autour des sachets de nicotine est similaire à celle utilisée pour promouvoir, il y a quelques temps, les cigarettes manufacturées et autres produits du tabac. » Selon elle, «  les fabricants de ces sachets de nicotine ont recours à des études financées par l’industrie du tabac, de manière publique ou dissimulée, mais aussi à des experts « douteux » du fait de leurs accointances avec cette industrie. » Le but : influencer le débat et faire pression pour obtenir l’ouverture du marché de l’Union Européenne aux sachets de nicotine, en mettant en avant l’argument de la réduction des risques. Lobbying oblige, on a même vu des eurodéputés mettre en avant des sachets de nicotine dans leurs publications et vidéos, et partager les positions d’un site nommé « tobaccoharmreduction.net »…

Source : LSDJ(Judikael Hirel)

Akondanews.net

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