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Le putsch en Guinée est consommé. Les armes se sont tues à Conakry et le ballet diplomatique a ouvert la route des conciliabules qu’a déjà empruntée Antonio Guterrėss, SG de l’ONU. Il a condamné la prise du pouvoir par les armes et demandé la libération immédiate du président Alpha Condé, arrêté par les putschistes.
« Je suis de très près la situation en Guinée. Je condamne avec la plus grande fermeté le renversement du gouvernement par la force des armes, et j’appelle à la libération immédiate du président Alpha Condé. » a déclaré le Secrétaire Général de l’ONU Antonio Guterres
Cette sortie à la cantonade résonne comme un aveu général d’impuissance. Et la crise guinéenne enseigne deux leçons.
La première est relative aux forces dites spéciales. Chaque régime se dote désormais, et c’est la mode, de cette unité d’élite. Mais à l’ouvrage, elle se révèle un couteau à double tranchant. Car, doté de grands moyens et de troupes bien formées et bien entraînées, autant elle défend un régime, autant elle est capable de le renverser. Sans coup férir.
Ce fut le cas au Mali. Le colonel Assimi Goïta, l’actuel président du Comité national pour le salut du peuple (CNSP, junte militaire), était le commandant du bataillon autonome des forces spéciales. C’est lui qui, surfant sur la protestation populaire, a destitué, le 18 août 2020, Ibrahim Boubacar Kéita.
En Guinée, c’est ce statut d’autonomie que réclamait le lieutenant-colonel Mamady Doumbouya pour le Groupement des forces spéciales (GPS) qu’il dirigeait. Entré alors dans le collimateur du pouvoir qui le soupçonnait de velléités subversives, il est passé à l’offensive ce dimanche 5 septembre 2021 pour renverser Alpha Condé et prendre la tête du Comité national du rassemblement et du développement (CNRD, junte militaire).
La seconde leçon est politique et porte sur la CEDEAO. Cette organisation sous-régionale de quinze pays est en train de s’essouffler pour devenir un croque-mitaine qui n’effraie presque plus. Son protocole sur la démocratie et la bonne gouvernance, dont elle n’assure nullement le respect en amont, interdit les coups d’État et la prise du pouvoir par les armes.
Mais cette disposition ne réduit nullement les ardeurs subversives dans notre sous-région parce que, souffrant de partialité, la CEDEAO se révèle souvent juge et partie pour se disqualifier.
Personne ne l’a oublié. Dans la crise militaro-politique ivoirienne (2002-2011), elle avait clairement pris parti, d’abord en ne condamnant pas la rébellion armée dans sa tentative de renversement du régime et ensuite, en menaçant de faire intervenir son armée Ecomog pour chasser Laurent Gbagbo du pouvoir.
Alors, elle a brandi des sanctions ciblées contre le Mali (suspension du pays de toutes ses instances, embargo économique et financier, etc.) pour obtenir une transition civile au Mali, mais le colonel Goïta, après avoir plié, est revenu et se trouve bel et bien à la barre.
Instruit de cet épisode, l’ex-légionnaire Doumbouya va s’enfoncer dans cette brèche pour installer sa transition militaire en Guinée. Surtout que la CEDEAO n’a jamais réussi ou voulu faire revenir au pouvoir un chef de l’État démis par la force des armes.
F. M. Bally
Akondanews.net