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Libreville, le 24.02.2022,Au Gabon, Jean Ping, candidat malheureux à la présidentielle de 2016, revient à la charge. Celui qui revendique toujours sa « victoire volée » martèle que le Président Ali Bongo n’est plus en état de diriger le pays, en raison de son état de santé. Une sortie perçue comme un positionnement pour la présidentielle de 2023.
On ne l’avait plus beaucoup entendu parler, depuis le 31 décembre dernier, à l’occasion de son traditionnel discours de fin d’année qu’il a initié à la suite de son auto proclamation en 2016 comme « Président élu » du Gabon. Très suivi par le passé, dans l’euphorie de la contestation des résultats de la présidentielle, les sorties de l’opposant gabonais Jean Ping n’ont plus le même retentissement et pourtant il est loin d’avoir abdiqué. Dans un discours au vitriol, le 19 février, celui qui conteste toujours le mandat d’Ali Bongo n’est pas allé du dos de la cuillère pour examiner le bilan de santé du Président gabonais, affaibli par un accident vasculaire cérébral (AVC), et sa capacité à gouverner.
« Depuis le spectacle affligeant et dévastateur d’Ali Bongo sur le perron de l’Élysée en décembre 2021, le peuple gabonais et la communauté internationale ne peuvent plus se retrancher derrière les supputations et prétendent ne rien savoir de l’état réel de la santé d’Ali Bongo. Ali Bongo n’est plus en capacité de gérer sa propre santé, et encore moins de gérer le pouvoir usurpé, au point de servir de marionnette à de nouveaux usurpateurs qui livrent le pays aux enchères », a déclaré l’opposant.
Jean Ping estime que le Gabon est devenu « un navire sans capitaine ni boussole, livré au gré des convoitises », et en conséquence l’opposant « demande aux institutions habilitées par la Constitution de déclarer la vacance de pouvoir ». La sortie de l’opposant Jean Ping semble faire écho à des questionnements soulevés par tous les Gabonais, selon Freddy Lagme, analyste politique et enseignant à l’université de Douala.
« Face à l’état de santé peu rassurant du Président gabonais, comme tout le monde a pu le voir lors de ses dernières sorties, chaque citoyen ou institution peut s’en inquiéter et même pour certaines, demander de constater la vacance au pouvoir », commente-t-il au micro de Sputnik.
En route pour 2023?
Il y a trois ans, le 24 octobre 2018, le Président gabonais avait été victime d’un AVC lors d’une visite en Arabie saoudite. Après une longue période d’absence sur la scène internationale, du fait sans doute de son traitement et de sa rééducation, Ali Bongo a entamé un périple international fin 2021. Entre la 26e Conférence des Nations unies sur le changement climatique (COP26) à Glasgow, Rabat au Maroc, ou encore à Paris lors du 75e anniversaire de l’Unesco, il a continué à assurer bon gré mal gré sa fonction présidentielle. Des sorties qui ont laissé apercevoir un chef d’État à la mobilité chancelante et à l’élocution hachée.
D’ailleurs lors de son passage en France, Ali Bongo avait pour ainsi dire trébuché avant de s’appuyer sur son homologue Emmanuel Macron, en l’absence de sa canne, qui ne le quitte plus, gardée ce jour-là par son protocole. Des images qui ont fait débat dans le pays et au-delà, et relancé la question sensible sur sa capacité à poursuivre son mandat. Cependant pour certains analystes, ce périple international d’Ali Bongo est une forme de renaissance, qui laisse présager sa capacité à aller briguer un troisième mandat en 2023. Cette sortie frontale sur la santé d’Ali Bongo est pour Jean Ping, souligne Freddy Lagme, un moyen de se repositionner comme « le profil idéal pour conduire le Gabon dans sa future destinée ». « En tant que politicien, il est à l’affut de toutes les failles. Dans ce cas, s’il réussit à faire constater la vacance au pouvoir, un boulevard pourrait s’offrir à lui dans la perspective de la conquête du pouvoir. D’ailleurs dans son discours, il est loin d’avoir renoncé à son ambition présidentielle», commente l’analyste.
Reclus dans sa résidence du quartier des Charbonnages, à Libreville, Jean Ping, 79 ans, ancien président de la commission de l’Union africaine et principal candidat de l’opposition gabonaise en 2016, sera-t-il candidat à la présidentielle de 2023? Si rien ne permet de le dire pour le moment, une chose est certaine, le politicien revendique toujours sa « victoire volée »: « La clef de voûte du Gabon et du redressement de notre pays, sur tous les plans, c’est l’alternance et l’exercice du pouvoir, que les Gabonaises et les Gabonais m’ont confié, en m’élisant avec plus de 65% des suffrages. » Il revient donc à Jean Ping qui a brillamment gagné les élections, d’accéder au pouvoir et de gouverner, conformément aux sacro-saints principes démocratiques», a-t-il martelé lors de son discours.
En 2016, l’annonce de la réélection du Président sortant Ali Bongo, au pouvoir depuis 2009, avait donné lieu à des violences meurtrières, à la suite de manifestations organisées par les partisans de M. Ping et réprimées par les forces de l’ordre. Depuis lors, il se considère toujours comme le « Président élu » du Gabon et n’a de cesse de le marteler dans ces différentes sorties.
Raphael LUMOO
Akondanews.net