CÔTE D’IVOIRE : DECRISPER L’ATMOSPHERE POLITIQUE, UNE NECESSITE

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Le Premier Ministre, Ministre de la Défense, Député de Séguéla et Maire d’Abobo, M. Hamed Bakayoko a achevé son cheminement terrestre. Il a été porté en terre dans sa ville d’origine et ce, dans l’intimité familiale. Il a reçu les hommages de la République, des autorités politiques d’ici et d’ailleurs, mais aussi du petit peuple.

Il est de notoriété publique qu’en en Afrique, on n’évoque pas par décence, les défauts d’un défunt. Tous les témoignages sur l’homme recueillis par la télévision publique et les journaux, ont mis en exergue sa générosité et son altruisme. De tous ces témoignages, l’allusion à l’argent revient de façon récurrente  « …il m’a donné…il a payé…qui payera… ». C’est à croire que la bonté de l’homme ne repose que sur l’argent.

En tout état de cause, l’homme a achevé son pèlerinage sur cette terre injuste des hommes et prions l’Incréé pour qu’il l’accueille dans sa félicité céleste !

Comme l’enseignent les Saintes Ecritures, Poussière, l’on retournera à la poussière. Toutes les richesses amassées sur terre, toute la crainte qu’on peut inspirer, toute l’admiration qu’on peut avoir, tout pouvoir de vie ou de mort dont on peut disposer sur autrui, s’effondrent dès lors que le Tout-Puissant retire le souffle de vie qu’il a généreusement donné. Et seul on se retrouve dans le petit espace qui sert de dernière demeure. Cette donne doit inspirer les hommes, les conduire à plus d’humilité et surtout à moduler leurs comportements et leurs agissements dans la relation avec les autres.

C’est un truisme de dire qu’en ce moment une douleur indicible, difficilement supportable étreint les parents du premier ministre, qui voient disparaître leur fils dans la fleur de l’âge.

Il est tout aussi bon de souligner que, c’est cette même douleur qui a étreint les parents de Boga Doudou, Désiré Tagro, Bohoun Bouabré, Gossio Marcel, Abouo N’dori, etc. et plus récemment N’guessan Koffi Toussaint, le jeune manifestant décapité à Daoukro ou Ahui Charles Aristide, prisonnier politique décédé le 9 mars dernier. Et la compassion qu’on peut avoir pour les uns, on doit pouvoir l’avoir pour les autres.

Mais la vie ne s’arrête pas pour autant en Eburnie. Que les ivoiriens le veuillent ou non, ils sont obligés de vivre ensemble, de partager la même aire géographique, de fréquenter les mêmes écoles, les mêmes marchés, les mêmes « maquis », les mêmes bars, les mêmes Eglises, les mêmes Mosquées…

Pour faciliter ce vivre ensemble, il urge que ceux des nôtres qui tiennent les manettes de notre locomotive, posent des actes forts pour détendre l’atmosphère politique, éviter que les ivoiriens ne se regardent en chiens de faïence mais surtout pour restaurer la confiance entre citoyens d’un même pays.

Depuis la crise postélectorale, de nombreux ivoiriens, militaires et civils, croupissent dans les sous-sols d’Abidjan (selon l’expression du professeur Mémel Foté).

De nombreux autres les ont rejoints lors des manifestations de protestation contre le troisième mandat. Depuis des mois, ils sont incarcérés sans jugement à l’image de Pulchérie Gbalet. D’autres encore sont morts sans être passés devant le juge.

Si tant est que le premier mandat de la troisième république a été acté par la participation de tous aux élections législatives, le temps est arrivé, dans un pays où l’incertitude est le partage de tous, et même au sommet de l’Etat, de quitter la posture de belligérance, d’en finir avec les invectives et de libérer tous les prisonniers politiques.

Il faut également en finir avec cette propension qu’on a, de réciter la litanie de la justice qui doit se tenir, mais qui dans la pratique ne se tient que dans un seul camp.

Or il faut être à deux pour se battre. Il n’y a ni ange d’un côté, ni démon de l’autre.

Libérer les prisonniers politiques, serait un acte sublime que les ivoiriens apprécieront à sa juste valeur et qui mettra véritablement le pays sur la rampe de la réconciliation ; et le retour attendu du président Laurent Gbagbo ne viendra que parachever l’effort de tous. Toute autre réaction conduira la Côte d’Ivoire vers des lendemains incertains et qui certainement ne chanteront pas.

Mais gardons espoir, s’il y a eu un matin en Eburnie, il y aura assurément un soir et l’ivraie sera séparée du vrai.

NAZAIRE KADIA, Analyste politique

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