Rwanda et Zaïre : le double génocide de Clinton, trois décennies de dissimulation

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Le Rwanda, quelle histoire ?

La guerre qui sévit depuis 27 ans dans l’est du Congo reste à ce jour très peu médiatisée. Le journaliste Anjan Sundaram, auteur de Stringer, Bad News and Breakup : A Marriage in Wartime, se souvient que ce sont les articles d’un paragraphe qu’il lisait dans le New York Times et d’autres publications à grand tirage, qui citaient tous des chiffres stupéfiants de millions de civils morts, qui l’ont incité, après l’obtention de son diplôme, à renoncer à travailler pour Goldman Sachs, choisissant plutôt de se rendre en République Démocratique du Congo pour comprendre ce qui se cachait derrière ces atrocités de masse.

Dans un article du 11 avril 2023 du New York Times intitulé  He’s a Brutal Dictator, and One of the West’s Best Friends (C’est un dictateur brutal et l’un des meilleurs amis de l’Occident), Anjan Sundaram écrit à propos de l’actuel président Paul Kagame et de son mouvement, le Front patriotique rwandais (FPR) : « Bien que l’ancien ambassadeur de M. Kagame aux États-Unis et d’autres alliés politiques l’aient accusé d’avoir « déclenché » le génocide rwandais et d’avoir fait peu pour l’empêcher, il s’est présenté comme le héros qui y a mis fin. (…) Derrière cette image de lion, il y a une vérité plus sombre. Depuis qu’il a pris le pouvoir en 1994 en tant que commandant en chef de l’armée rwandaise, puis en tant que président, M. Kagame a pratiquement truqué les élections, remportant près de 99 % des voix en 2017. Nombreux de ses opposants ont disparus, certains ont été retrouvés assassinés, et dans  d’autres cas, virtuellement décapités. Le héros autoproclamé qui a prétendument mis fin au génocide rwandais était également à la tête d’une armée qui, selon l’ONU, était responsable du meurtre de dizaines, voire de centaines de milliers de Hutus et d’actes potentiels de « génocide » après avoir envahi à deux reprises la République démocratique du Congo. »

Dans un ouvrage novateur publié en 2014, Rwanda 1994 : The Myth of the Akazu GenocideConspiracy and its Consequences (Rwanda 1994 : le mythe de la conspiration génocidaire de l’Akazu et ses conséquences) qui prend en compte un large éventail d’acteurs impliqués dans les événements, le chercheur Barrie Collins jette également un nouvel éclairage sur le rôle du FPR, dirigé par les Tutsis, dans les tragédies de la région : « Une armée à base ethnique a détruit un processus de réforme qui avait abouti à la rédaction d’une constitution démocratique, a assassiné un chef d’État afin de provoquer un massacre de civils à une échelle grotesque pour son propre bénéfice politique – la mort d’un deuxième président étant un dommage collatéral – et a perpétré des massacres à grande échelle de civils rwandais et congolais. Il a continué à organiser des escadrons de la mort contre ses opposants politiques, à gérer l’un des systèmes pénitentiaires les plus inhumains au monde et à jouir des atours du pouvoir d’État dans sa vingtième année… Le mythe de la conspiration du génocide de l’Akazu, universellement adopté, est un pilier idéologique crucial de la première tyrannie moralement constituée de l’Afrique. »

L’ouvrage de Michela Wrong, 2021 Do Not Disturb : The Story of a Political Murder and an African Regime Gone Bad, révèle comment le régime du Front patriotique rwandais (FPR), dirigé par les Tutsis et arrivé au pouvoir en juillet 1994, a utilisé l’élimination physique de ses opposants comme moyen de dissuasion contre toute forme d’opposition interne, ainsi que comme moyen de faire taire les récits alternatifs à l’histoire récente de la région.

Wrong ne nous dit cependant pas quand ce régime a « mal tourné », sous-entendant ainsi dans le titre même du livre qu’il a été « bon » à un moment donné. Le Front patriotique rwandais était-il un « bon » mouvement lorsqu’il a décidé d’ignorer le droit international et les accords d’Arusha et d’envahir le Rwanda en 1990-1994 ? Était-ce un « bon » régime quand il a décidé d’envahir l’est du Zaïre en 1996 et de renverser son président Mobutu Sese Seko en créant une rébellion factice, l’Alliance des forces démocratiques pour la libération du Congo (AFDL), composée principalement de soldats des armées ougandaise et rwandaise, et qu’il l’a vendue comme un mouvement de libération congolais ?  Était-ce un « bon » régime lorsqu’il a décidé de bombarder les camps de réfugiés hutus dans l’est du Zaïre ? Ou lorsqu’il a occupé l’est du Congo pour piller ses précieux minerais par l’intermédiaire du Bureau Congo et, par la suite, des rébellions par procuration depuis 1996 (AFDL, RCD-Goma, CNDP, M23, ADF) qui ont causé la mort de centaines de milliers de réfugiés rwandais, de plus de 10 millions de civils congolais, déplacé 6,1 millions de civils congolais et violé un nombre stupéfiant de 500 000 femmes congolaises ?

Wrong pose la question suivante : « Comment écrire l’histoire contemporaine du Rwanda alors que tant de sources clés admettent aujourd’hui avoir menti à l’époque ? » Elle se demande pourquoi elle n’a pas posé plus de questions lorsque Patrick Karegeya, l’ancien chef des renseignements extérieurs du Rwanda, était encore en vie en exil, avant son assassinat en Afrique du Sud en 2014 : « Je ne voulais pas me confronter à la vérité, à savoir à quel point j’avais pu me tromper. » Pas de commentaire.

Michela Wrong souligne un « serment d’omertà » que le FPR a respecté ; reconnaît qu' »une seule interprétation de l’histoire sera tolérée » dans le Rwanda d’aujourd’hui ; souligne que « mettre en doute la crédibilité de la thèse des Extrémistes hutus (pour l’abattage de l’avion présidentiel le 6 avril 1994 qui a déclenché la folie meurtrière de 100 jours) et vous étiez susceptible d’être étiqueté comme un « révisionniste », au même titre que les négationnistes de l’Holocauste » ; souligne que « quiconque remet en question l’histoire officielle est un « négationniste du génocide », même lorsque la personne concernée – comme Kizito Mihigo– est un Tutsi qui a perdu des membres de sa famille pendant le génocide. Cette accusation n’est pas anodine, car au Rwanda, « minimiser » ou « nier » le génocide est un délit passible de dix ans de prison. »

Ces accusations visent également des personnalités qui ne sont pas rwandaises. À la suite de la diffusion du documentaire de la BBC Rwanda’s Untold story, qui raconte une histoire différente de la version officielle, le gouvernement rwandais a suspendu la programmation de la BBC et a déclaré qu’il mettrait en accusation les producteurs de la BBCpour « négation du génocide.« 

« Pourtant, elle ne prend pas la peine de consulter les écrits des chercheurs qui sont considérés comme des « négationnistes du génocide » par les experts du récit dominant, tels que Pierre Péan,Boniface Musavuli, Patrick Mbeko, Charles Onana, Barrie Collins, Emmanuel Nashi, Allan Stam et Christian Davenport, Robin Philpot, Juan Carrero, Keith Harmon Snow, Wayne Madsen, Edward S. Herman et David Peterson parmi beaucoup d’autres. Wrong reconnaît que si des faits différents apparaissaient aujourd’hui, cela « nécessiterait la révision de toute l’histoire du génocide », mais elle continue d’épouser un des principaux arguments occidentaux, à savoir le récit de « l’Occident comme simple spectateur », qui occulte la guerre internationale soutenue par les États-Unis contre le Rwanda et, par la suite, contre le Congo.

Comme pour la guerre contemporaine en ex-Yougoslavie, les experts ont exposé « l’idéologie et le mythe qui paradent sous l’apparence de l’histoire – facilement réfutés, mais faisant partie du récit standard qui ne peut être remis en question dans un système fermé ». A tort – comme Alison Des Forges, Gérard Prunier, David Millwood, Philip Gourevitch, Howard Adelman, Astri Suhrke, Linda R. Melvern, Colette Braeckman, Filip Reyntjens, Mahmood Mamdani, entre autres – ont contribué, en présentant un récit historique biaisé et tronqué, à maintenir le débat fermé, sans tenir compte des énormes conséquences tragiques et traumatisantes qu’une histoire tronquée et souvent inventée peut avoir sur une nation et son peuple.

Les facteurs externes qui ont conduit à l’éclatement de la Yougoslavie ont été minimisés, tout comme ils l’ont été lors de l’analyse du Rwanda. Une analyse approfondie des archives historiques révèle aujourd’hui que les États-Unis ont soutenu l’invasion rwandaise menée par les Tutsis depuis l’Ouganda et le changement de régime en 1990-1994, ainsi que l’invasion par l’AFDL de ce qui était alors le Zaïre en 1996. Le « mythe du génocide de l’Akazu » ou des arguments tels que « l’implication directe de la France dans le soutien d’un régime génocidaire » ont servi de couverture pour détourner l’attention de ce qui était un changement de régime soutenu par les États-Unis contre le président rwandais Juvénal Habyarimana.

L’un des défauts de Do Not Disturb : The Story of a Political Murder and an African Regime Gone Bad, est qu’il est écrit dans un vide géopolitique, réduisant les événements à une affaire interne au Rwanda. Dans l’ère post-soviétique et post-guerre froide, les États-Unis ont abandonné leur allié de longue date, le président congolais Mobutu Sese Seko, alors qu’ils lançaient une nouvelle politique étrangère en soutenant les soi-disant « leaders de la nouvelle renaissance » en Afrique : Paul Kagame a été salué comme l’un des dirigeants africains de la « renaissance », au même titre que Yoweri Museveni (Ouganda) et Meles Zenawi(Éthiopie). La rivalité anglo-française, essentielle pour comprendre les événements dans la région, est également omise.

Collins, dans Rwanda 1994 : The Myth of the Akazu Genocide Conspiracy and itsConsequences, souligne qu’au début de la guerre, les États-Unis ont apporté un soutien diplomatique au mensonge pur et simple selon lequel le président ougandais Yoweri Museveni avait été pris par surprise lorsqu’un grand nombre de Rwandais servant dans son armée avaient soudainement « fait défection » et envahi le Rwanda : « Ils savaient que Museveni avait participé à l’opération. Au lieu d’arrêter les combattants du FPR lorsqu’ils ont été repoussés en Ouganda, Museveni les a réarmés et leur a permis d’utiliser l’Ouganda comme base arrière jusqu’à ce qu’ils soient suffisamment forts pour établir une base à l’intérieur du Rwanda.« 

La journaliste Helen E. Epstein dans un article de 2017 pour The Guardian, le rôle secret des Etats-Unis dans le génocide rwandais écrit : « Trois ans et demi avant le génocide, une armée rebelle composée principalement d’exilés tutsis rwandais, connue sous le nom de Front patriotique rwandais, ou FPR, avait envahi le Rwanda et établi des camps dans les montagnes du nord du pays. Ils avaient été armés et entraînés par l’Ouganda voisin, qui a continué à les approvisionner tout au long de la guerre civile qui a suivi, en violation de la charte des Nations unies, des règles de l’Organisation de l’unité africaine, de divers accords de cessez-le-feu et de paix rwandais, et des promesses répétées du président ougandais, Yoweri Museveni ». (…) « Les Etats-Unis surveillaient les livraisons d’armes ougandaises au FPR en 1992, mais au lieu de punir Museveni, les donateurs occidentaux, dont les Etats-Unis, ont doublé l’aide à son gouvernement et ont permis à ses dépenses de défense d’atteindre 48% du budget de l’Ouganda, contre 13% pour l’éducation et 5% pour la santé, alors même que le sida faisait des ravages dans le pays. En 1991, l’Ouganda a acheté 10 fois plus d’armes américaines qu’au cours des 40 années précédentes combinées. »  

Epstein, bien qu’il ait rapporté des faits aussi dommageables pour la politique étrangère des États-Unis dans la région, dépeint toujours de manière déconcertante sa politique comme neutre ou « observatrice » et continue de qualifier les événements de guerre civile plutôt que d’agression internationale pure et simple. Par exemple, l’ancien ambassadeur américain en Ouganda, R. E. Gribben, dans son mémoire de 2005 intitulé In the Aftermath of Genocide : The U.S. Role in Rwanda (2005), l’ancien ambassadeur des États-Unis en Ouganda, R. E. Gribben, a révélé que les services de renseignement américains étaient parfaitement au courant du soutien apporté par Museveni au FPR. « Gribbin confirme que les États-Unis disposaient de renseignements sur l’implication de l’Ouganda et qu’ils ont exprimé leur admiration pour la capacité de Museveni à maintenir un « déni plausible » en la matière », écrit Barrie Collins dans Rwanda 1994 : The Myth of the AkazuGenocide Conspiracy and its Consequences.

Collins affirme que deux éléments clés de désinformation ont été diffusés et ont reçu l’aval de la communauté internationale : l’avion du président avait été abattu par des membres de l’Akazu, un réseau obscur d’individus proches du président défunt, et les massacres de civils qui ont éclaté le lendemain étaient le déroulement d’un génocide que l’Akazu avait planifié longtemps à l’avance. Ces deux récits ont depuis été démentis par d’innombrables recherches historiques sur des documents d’archives rendus publics, ainsi que par une vaste documentation sur plus de vingt ans de procès judiciaires devant le tribunal ad hoc d’Arusha, ainsi que par des procès en Espagne, en France ou au Canada. Collins souligne que les points de vue du FPR à l’époque font étrangement écho à ceux du secrétaire adjoint au renseignement et à la recherche de l’administration Clinton, T. Gati, ou du principal responsable des droits de l’homme, John Shattuck.

L’expert des Grands Lacs africains Charles Onana, qui a déjà publié huit enquêtes sur l’histoire récente de la région, nous plonge dans son récent Holocauste  au Congo, L’omertà de la communauté internationale, La France complice ? , dans les années qui ont précédé et suivi la chute du président congolais Mobutu Sese Seko avec l’invasion du Zaïre en 1996 par l’Alliance des Forces Démocratiques pour la Libération du Congo (AFDL) et la mise en place d’un système d’occupation qui perdure encore aujourd’hui.

Les événements majeurs sont reconstitués à l’aide d’un éventail impressionnant de sources d’archives primaires : dossiers présidentiels américains et français, rapports et notes des agences de sécurité nationales américaines, lettres, auditions du Congrès, procès judiciaires, enquêtes parlementaires et articles de journaux de l’époque, ainsi que des entretiens avec des acteurs clés. Les sources secondaires sont également largement citées, avec une attention particulière pour une variété d’auteurs congolais émergents moins connus.

Nous apprenons que l’administration Clinton exerçait une forte pression diplomatique sur Mobutu pour qu’il démissionne, alors que les réunions entre Mobutu et l’ambassadrice américaine à Kinshasa, Melissa Wells, ainsi que l’ambassadeur américain auprès des Nations Unies, Bill Richardson, sont évoquées : leurs propos intimidants violent l’étiquette diplomatique, rappelant les relations de pouvoir coloniales. Mobutu et certains membres de son entourage ont été soumis à des restrictions de visa américain en 1993 et lui et sa famille ont fait l’objet d’une vaste campagne de diabolisation orchestrée par la presse internationale.

Masquer les agresseurs

Les violentes incursions des rebelles dans l’est du Congo depuis 1996 ont été justifiées tout au long des années par la communauté internationale et de nombreux universitaires et journalistes par des arguments douteux tels que « la nécessité pour le Rwanda de protéger son territoire des attaques des réfugiés hutus dans l’est du Zaïre » ou « la nécessité de protéger une persécution congolaise d’une minorité tutsie, connue sous le nom de Banyamulenge, historiquement infondée, dans l’est du Congo. »

Holocauste au Congo révèle que ces deux récits trompeurs, bien qu’épousés par les responsables américains et européens à l’époque, ne correspondaient pas à ce que leurs services de renseignement respectifs leur rapportaient : dès septembre 1994, les rapports des services de renseignement français et américains soulignaient que les réfugiés de l’ancienne armée nationale rwandaise au Zaïre ne représentaient aucune menace militaire pour le Rwanda ; dès novembre 1994, un rapport du Bureau of Intelligence and Research du département d’État américain prédisait que le Front patriotique rwandais provoquerait un conflit dans l’est du Zaïre. Un chapitre entier est consacré au terme controversé de Banyamulenge.

La plupart des livres d’histoire qui font autorité sur la région affirment que l’est du Congo a été envahi pour « désarmer les Hutus dans les camps de réfugiés » et « protéger les Banyamulenge » : tous citent le vice-gouverneur du Sud-Kivu, Lwabandji Lwasi Ngabo, comme ayant tenu des propos xénophobes et dangereux à l’encontre de cette minorité tutsie. Or, Lwasi Ngabo a dit exactement le contraire : au Sud-Kivu, le 8 octobre 1996, il a annoncé la mise en place d’un corridor humanitaire pour évacuer les populations tutsies et les autres populations civiles non impliquées dans la guerre d’agression qui venait de commencer. Aucun historien ou journaliste n’a rectifié ce mensonge alors que le vice-gouverneur Lwasi Ngabo a depuis gagné un procès en Belgique apportant la preuve de ce qu’il avait déclaré à l’époque, à savoir qu’il voulait amener la population dans une zone sûre, plus éloignée de la frontière et donc de la zone de guerre.

La plupart des journalistes et des universitaires ont rapporté les arguments du FPR, plutôt que de vérifier les faits sur le terrain, ce qui a permis de camoufler la guerre d’agression internationale.

Malheureusement, ces deux récits facilement discutables, à savoir que « les FDLR (un groupe de réfugiés hutus de 1994) sont la principale cause d’instabilité dans l’est du Congo » et que « les Banyamulenge doivent être protégés dans l’est du Congo », perdurent aujourd’hui et sont utilisés comme prétextes par les rébellions proxy (par procuration) rwandaises pour l’occupation génocidaire de l’est du Congo.

« Les FDLR sont aujourd’hui au Sud-Kivu essentiellement des agriculteurs,«  me dit un témoignage qui préfère rester anonyme par téléphone en juillet 2023. « Ils ne représentent pas une menace pour nos communautés, mais ils nous disent qu’ils espèrent pouvoir un jour rentrer chez eux, au Rwanda. C’est l’armée rwandaise qui constitue la principale menace aujourd’hui, par l’intermédiaire de son mouvement rebelle M23. Même lorsque des groupes civils d’autodéfense ont réussi à capturer récemment un haut fonctionnaire rwandais, la mission de l’ONU est restée silencieuse, elle n’a pas dénoncé cette présence étrangère sur le territoire congolais.« Cette attitude de non-identification des auteurs de crimes de la part de la mission de l’ONU est pour le moins très préjudiciable à son mandat de protection. Elle permet également l’impunité des auteurs de l’agression internationale.

Une page sombre de l’histoire de l’agence des Nations unies pour les réfugiés, le HCR, est la suppression du rapport Gersony sur les crimes contre l’humanité du FPR au Rwanda. Plus tard, l’agence des Nations unies pour les réfugiés a violé le principe de non-refoulement (« pas d’expulsion de réfugiés vers un pays à haut risque »), pierre angulaire de l’asile et du droit international des réfugiés, en faisant pression pour un retour volontaire des quelque 2 millions de réfugiés hutus (soit un tiers de la population rwandaise), qui avaient fui l’avancée du FPR, vers le Congo (alors Zaïre) à une époque où tous les rapports des services de renseignement et des ONG indiquaient que les Hutus étaient souvent arrêtés, voire tués, lorsqu’ils rentraient chez eux. Le HCR est resté silencieux lorsque le Rwanda, tandis que les États-Unis et d’autres pays occidentaux restaient également taciturnes, a bombardé les camps de réfugiés hutus dans l’est du Zaïre, dispersant sa population en 1996. Il est également resté silencieux lorsqu’un faux mouvement de libération, l’AFDL, a poursuivi et assassiné des réfugiés hutus pendant des mois dans tout le Congo, causant la mort de centaines de milliers d’entre eux. Aujourd’hui, d’innombrables témoins rwandais qui ont survécu ont raconté ce voyage tragique. Pire encore, faute d’avoir abordé la question à l’époque, cette tragédie perdure encore aujourd’hui.

Nous apprenons du ministre de la défense du président Chirac de l’époque, Charles Million, qui a écrit la préface d’Holocauste au Congo, que Bill Clinton en personne a dissuadé la France de lancer une force d’intervention indispensable pour protéger les populations (les réfugiés hutus et les civils congolais) dans l’est du Congo.

La preuve la plus surprenante apportée par Holocauste au Congo est peut-être de briser le mythe selon lequel les États-Unis et l’Occident en général ont « détourné le regard » de ces deux tragédies. Les raisons souvent invoquées sont, par exemple, que Washington a dû rechercher des approches peu risquées en matière d’intervention dans les conflits après le retrait de l’armée américaine de Somalie, ce qui a provoqué ce que l’on appelle aujourd’hui le « syndrome somalien.« Cette position non interventionniste fait plutôt partie de la propagande américaine, dont l’objectif était d’obscurcir ce qui était en fait une guerre internationale par une intervention soutenue par les États-Unis au Congo Kinshasa.

Les pensées et les perceptions des principaux hommes politiques américains qui, à l’époque, ont traité et développé des politiques sur la crise prennent vie à travers des citations directes tirées de documents d’archives, de rapports, de lettres et d’interviews : des mots des personnalités telles que Bill Clinton, président des États-Unis à l’époque ; Melissa Wells, ambassadeur des États-Unis ; Roger Winter, directeur exécutif du U.S. Committee for Refugees and Immigrants;Anthony Lake, conseiller à la sécurité nationale de 1993 à 1997 et envoyé spécial de la Maison Blanche de 1998 à 2000, George Moose, secrétaire d’État adjoint pour l’Afrique de 1993 à 1997 et ambassadeur auprès des agences de l’ONU à Genève de 1997 à 2001, William Perry,Secrétaire américain à la Défense ; Bill Richardson, ambassadeur des États-Unis auprès des Nations unies entre 1997 et 1998 ; Susan Rice, fonctionnaire du Conseil national de sécurité de 1993 à 1997 (en tant que directrice des organisations internationales et du maintien de la paix de 1993 à 1995, et en tant qu’assistante spéciale du président et directrice principale des affaires africaines de 1995 à 1997 et secrétaire d’État adjointe aux affaires africaines de 1997 à 2001) ; Thomas Pickering, sous-secrétaire d’État aux affaires politiques ; l’ambassadeur Richard Bogosian, coordinateur pour le Rwanda et le Burundi, sont largement reproduit.

Des nombreuses questions ont été soulevées à l’époque par les membres du Congrès américain qui demandaient sans relâche des explications sur l’aide militaire américaine apportée au Rwanda, qui envahissait à son tour le Zaïre. Holocauste au Congo fait revivre ces questions pertinentes qui n’ont pas reçu de réponse officielle depuis lors.

Dans quelle mesure le changement de régime qui a renversé Mobutu a-t-il été orchestré par des membres de l’administration Clinton ? On apprend par exemple que Dennis Hankins, conseiller à l’ambassade américaine à Kinshasa de 1996 à 1998, a voyagé avec les rebelles de l’AFDL et a régulièrement informé l’ambassadeur américain à l’ONU, Bill Richardson, de leur progression. Richardson confirme les liens étroits avec la rébellion par procuration de l’AFDL lors d’une audition de la commission des relations internationales de la Chambre des représentants des États-Unis, le 5 novembre 1997.

Un voile de silence

Le 22 juillet 1994, le président américain Clinton a lancé une mission de secours peu connue, l’opération Support Hope, alors que l’opération Turquoise, dirigée par la France et autorisée par les Nations unies le 22 juin 1994, était également déployée pour sécuriser la population rwandaise en fuite.

Les notes de renseignement, les rapports, les mémoires et les entretiens avec les principaux protagonistes américains et autres de l’époque rappellent que la priorité de l’opération « Support Hope » était de sécuriser le nouveau régime dirigé par les Tutsis à Kigali.

Un témoignage qui a participé à l’opération révèle à Onana son caractère secret : les soldats américains étaient priés de ne pas révéler à leurs proches la destination de leur déploiement. La complexité de la montée en puissance militaire de l’opération et de la formation au contre-espionnage qu’elle a dispensée au Rwanda, ainsi que la participation de personnalités politiques de haut niveau à ses réunions soulèvent de nombreuses questions sur le rôle de l’opération « Support Hope » dans la région. Onana demande par exemple dans quelle mesure l’administration Clinton des États-Unis a participé à la préparation du changement de régime contre Mobutu, étant donné qu’une opération militaire aussi complexe nécessite, selon les experts militaires, des mois de planification préalable.

Le soutien des États-Unis – diplomatique, financier et militaire – au régime minoritaire dirigé par les Tutsis à Kigali ne s’est pas démenti lorsque de graves violations des droits de l’homme au Rwanda, ainsi que par la suite au Zaïre, ont été dénoncées à l’époque par des rapports sur les droits de l’homme et les services de renseignement.

Ces crimes et actes de génocide sont aujourd’hui bien documentés, par exemple dans le livre de la journaliste canadienne Judie Rever, In Praise of Blood, paru en 2018, (traduit en français,Rwanda, l’éloge du sang, en 2020) qui traite des crimes commis par le FPR au Rwanda, et dans le rapport Mapping des Nations unies, publié en 2010, qui couvre la période 1993-2003 pour les crimes contre les droits de l’homme commis au Zaïre/RDC, ainsi que dans les nombreux rapports du Groupe d’experts des Nations unies sur la République démocratique du Congo (RDC), publiés depuis 2001. Bien que l’identité des principaux auteurs des violences (tels que les chefs de guerre Jules Mutubetsi ou Laurent Nkunda ou l’actuel conseiller présidentiel principal pour la sécurité au Rwanda James Kabarebe et le président Paul Kagame) soit largement connue depuis deux décennies au Congo, une culture de l’impunité règne au niveau national, régional et international.

Aujourd’hui, un voile de silence s’est installé sur ce qui était en 1996 le début d’une recolonisation pure et simple du Congo via des rébellions par procuration et la mise en place d’une structure d’occupation, via une « armée dans l’armée » imposée par des pourparlers de paix fallacieux, une occupation qui est en place jusqu’à ce jour.

Ce silence peut également être dû à une censure insensée : deux lancements de livres sur Holocauste au Congo ainsi que la projection du film Congo ! Le silence des crimes oubliés, du réalisateur Gilbert Balufu, ont été annulés en mai et juin 2023 à Paris. Un événement devait se tenir à la mairie du 20ᵉ arrondissement et l’autre à l’Institut des relations internationales et stratégiques, mais face à la pression politique d’ONG telles que Survie ou le Réseau contre l’Antisémitisme et tous les Racismes, les organisateurs ont dû chercher un autre lieu à la dernière minute.

Une ONG, le Réseau contre l’Antisémitisme et tous les Racismes, s’est même vantée sur Twitter d’avoir annulé la conférence sur le génocide congolais. Un tel activisme déplacé est difficile à comprendre. Surtout au regard de la protection physique nécessaire pour des écrivains comme Judie Rever qui risque même sa vie pour ses recherches : elle se souvient comment les services secrets belges l’ont abordée dans le hall de son hôtel en 2014 : « Je m’appelle Denis Ledure. Je suis le chef des services de protection rapprochée », une branche des services secrets belges « Je suis ici parce que nous avons des raisons de croire que l’ambassade du Rwanda à Bruxelles constitue une menace pour votre sécurité. » Charles Onana fait actuellement face à une procédure en France entamée par trois ONG pour « négationnisme du génocide » pour son travail de recherche sur l’Opération Turquoise qui a fait l’objet de son doctorat obtenu en 2017 à l’Université de Lyon. Les chercheurs et universitaires ne devraient pas avoir à vivre des expériences aussi déconcertantes et les ONG devraient plutôt se concentrer sur le ciblage des criminels des droits de l’homme et non sur ceux qui tentent de les dénoncer.

Il est regrettable que les deux parties ayant des points de vue différents sur l’histoire récente de la région des Grands Lacs africains ne puissent pas être débattues ouvertement, et que l’une d’entre elles, celle qui pousse le récit dominant et désormais institutionnalisé, recourt à des campagnes de diffamation et à des attaques juridiques, plutôt que d’organiser des discussions ouvertes sur les preuves et les faits. Cette attitude rend un très mauvais service à ceux qui tentent de comprendre les origines et la structure de la violence, afin d’y mettre un terme.

L’historien, journaliste et auteur Vijay Prashadparle de la sortie de son livre publié en 2020 Washington Bullets : A History of the CIA, Coups, and Assassinations et explique qu’il a écrit ce livre après avoir été scandalisé par le coup d’État parrainé par les États-Unis contre le leader indigène Evo Morales de Bolivie. Il déplore le vide politique dans lequel baigne la jeune génération d’aujourd’hui et estime que les intellectuels et les écrivains ont très mal fait leur travail en rappelant à la nouvelle génération les coups d’État incessants et ponctuels que les États-Unis et leurs alliés ont orchestrés dans le monde entier depuis la Seconde Guerre mondiale. Prashad estime qu’il y a un déficit dans la culture occidentale qui a réussi, d’une manière ou d’une autre, à ne pas digérer les faits facilement accessibles sur la nature diabolique de ces changements de régime. On devrait être indigné, mais la culture occidentale ne l’est pas, c’est plutôt une culture qui légitime les criminels de guerre tout en étant consciente de leurs crimes, ce qui, selon Prashad, est un problème majeur qui doit être compris, dénoncé et traité.

Sur quelle base juridique les États-Unis soutiennent-ils un régime qui est arrivé au pouvoir en envahissant un pays et en provoquant ainsi un génocide, puis en envahissant un autre pays pendant un quart de siècle ? 500 000 femmes ont été violées dans l’est du Congo depuis 1996, comme en témoigne sans relâche le Dr Denis Mukwege, gynécologue de renommée mondiale, militant des droits de l’homme et lauréat du prix Nobel de la paix, et pourquoi aucune ONG importante ne fait pression quotidiennement pour que cessent cette violence et cette déshumanisation ? Et après un quart de siècle et des millions de morts, comment tant de personnes ayant servi dans l’administration Clinton peuvent-elles encore rester silencieuses ? Où est notre indignation ?

Nicoletta Fagiolo

Akondanews.net

(version anglaise 👇🏿👇🏿👇🏿)

https://www.academia.edu/104807276/Rwanda_and_Zaire_Clintons_double_genocide_a_three_decades_coverup

 

Rwanda and Zaire : Clinton’s double genocide, a three decades cover-up

Rwanda, whose history?  

The 27-year on-going war in eastern Congo remains highly underreported to this day. Journalist Anjan Sundaram, author of Stringer, Bad News and Breakup: A Marriage in Wartime, recalls that it was the oneparagraph articles he would read in the New York Times and other main stream publications, which all cited staggering numbers of millions of civilians who had died, that prompted him after graduation to give up an opportunity to work for Goldman Sachs, opting instead to go to the Democratic Republic of Congo so as to understand what lies behind thesemass atrocities.

In a 11 April 2023 New York Times article, He’s a Brutal Dictator, and One of the West’s Best Friends Anjan Sundaram writes about current President Paul Kagame and his Rwandan Patriotic Front (RPF) movement: Although Mr. Kagame’s former ambassador to the United States and other political allies have accused him of “sparking” Rwanda’s genocide and doing little to prevent it, he has cast himself as the hero who ended it. (…) Behind the lionization lies a darker truth. Since taking power in 1994 as commander in chief of the Rwandan military, and later as president, Mr. Kagame has all but rigged elections, taking almost 99 percent of the vote in 2017. Many of his opponents have disappeared, in some cases found murdered, in one case virtually beheaded. The self-styled hero who supposedly ended the Rwandan genocide was also in command of an army that the U.N. has alleged was responsible for killing tens, perhaps hundreds of thousands of Hutus and for potential acts of “genocide” after twice invading the Democratic Republic of Congo.”

In a ground breaking 2014 book Rwanda 1994: The Myth of the Akazu Genocide Conspiracy and its Consequences, which takes into account a wide spectrum of actors involved in the events, researcher Barrie Collins also sheds a new light on the Tutsi-led RPF role in the region’s tragedies: “ An ethnically based army destroyed a reform process that had resulted in a democratic constitution being written into law, assassinated a head of state in order to provoke civilian slaughter on a grotesque scale for its own political gain – with the death of a second President being collateral damage – and conducted large-scale massacres of Rwandan and Congolese civilians. It has continued to visit deaths squads upon its political opponents, operate one of the world’s most inhumane prison systems, and to enjoy the trappings of state power in its twentieth year… The myth of the Akazu genocide conspiracy, universally adopted, is a crucial ideological pillar of Africa’s first morally constituted tyranny.”

Michela Wrong’s 2021 Do Not Disturb: The Story of a Political Murder and an African Regime Gone Bad, reveals how the Tutsi-led Rwandan Patriotic Front (RPF) regime which came to power in July 1994 has been using the physical elimination of its opponents as a deterrent against any form of internal opposition, as well as a way of silencing alternative narratives to the region’s recent history.

Wrong fails however to tell us when this regime “went bad”, thus underlying in the very book’s title that at some moment in time it was “good.” Was the Rwandan Patriotic Front a “good” movement when it decided to disregard international law and the Arusha accords and invade Rwanda in 1990-94? Was it  a “good “ regime when it decided to invade eastern Zaire in 1996 and overthrow its President Mobutu Sese Seko by setting up a sham rebellion known as the Alliance of Democratic Forces for the Liberation of Congo (AFDL) made up mainly of soldiers from the Ugandan and Rwandan army, yet sold it as a Congolese liberation movement?  Was it a “good” regime when it decided to bomb the Hutu refugee camps in eastern Zaire? Or when it occupied eastern Congo to loot its precious minerals via the Congo desk andsubsequently proxy rebellions since 1996 ( AFDL, RCD-Goma, CNDP, M23, ADF) who have caused the death of hundreds of thousands of Rwandan refugees, well over 10 million Congolesecivilians, displaced 6.1 million Congolese civilians and raped a staggering 500,000 Congolese women ?

Wrong asks “So how do you write Rwanda’s contemporary history when so many key sources now readily admit they lied at the time?” She wonders why she didn’t ask more questions while Patrick Karegeya, Rwanda’s former head of external intelligence,was still alive in exile, before his assassination in South Africa in 2014: I didn’t want to confront the truth of just how thoroughly I might have got it wrong. No comment.

Wrong underlines an oath of omertà which the RPF upheld ; recognizes that “only one interpretation of history will be tolerated” in today’s Rwanda; underscores that “to query the credibility of the Hutu extremist thesis (for the shooting down of the Presidential plane on the 6 of April 1994 which triggered the 100 day killing spree) and you were likely to be labeled a “revisionist,” on a par with Holocaust deniers; emphasizes that anyone who questions the official history is a “genocide-denier,” even when the individual concerned—like Kizito Mihigo—is a Tutsi who lost close family members during the genocide. That is no trivial accusation, because in Rwanda, “minimizing” or “denying” the genocide is an offense that carries a ten-year prison sentence.

Such accusations also target non-Rwandans. Following the release of the BBC documentary aired in 2014 Rwanda’s Untold story,telling a different story from the official version, the Rwandan government suspended BBC programming and said that it would indict the BBC producer’s for “ genocide denial.”

“Still, it was painful to accept that I might have unwittingly misled my readers, Wrong writes, yet she does not bother to consult any of the writings of the researches who are considered  “genocide deniers” by the dominant narrative pundits such as Pierre Péan, Boniface Musavuli, Patrick Mbeko, Charles Onana, Barrie Collins, Emmanuel Nashi, Allan Stam and Christian Davenport, Robin Philpot, Juan Carrero, Keith Harmon Snow, Wayne Madsen, Edward S. Herman and David Peterson among many others. Wrong recognizes that if different facts surface today this “would call for the revision of the entire history of the genocide,yet she still espouses a main western talking point, namely the “west as simple bystander” narrative, which obfuscates the US backed international war waged against Rwanda and subsequently Congo.

Just as with the contemporaneous former Yugoslavia war pundits exposed “ideology and myth parading under the guise of history—easily confuted, but part of the standard narrative that is unchallengeable in a closed system.” Wrongas Alison DesForges, Gérard Prunier David Millwood, Philip Gourevitch, Howard Adelman, Astri Suhrke, Linda R. Melvern, Colette Braeckman, Filip Reyntjens, Mahmood Mamdani among othershave contributed, by presenting a biased and truncated historical account, in keeping the debate closed, inconsiderate of the huge tragic and traumatic consequences which a truncated and often fabricated history can have on a nation and its people.

The external factors that drove Yugoslavia’s breakup weredownplayed as they were when analyzing Rwanda. A close analysis of the historical archives today reveals that the US supported the Tutsi-led Rwandan invasion from Uganda and regime change in 1990-94, as well as the AFDL invasion of then Zaire in 1996. The Akazu genocide myth or arguments such as France’s direct involvement in supporting a genocidal regimewere used as a cover-up for deflecting from what was a US backed regime change against Rwandan President Juvénal Habyarimana.

A shortcoming of Do Not Disturb: The Story of a Political Murder and an African Regime Gone Bad, is that it is written in a geopolitical void, reducing the events to an internal Rwandan affair. In the post-Soviet and post-cold war era, the United States abandoned their long-time ally, Congolese President Mobutu Sese Seko, as they launched a new foreign policy by supporting the so-called New Renaissance leaders in Africa: Paul Kagame was hailed as one of Africa’s “renaissance” leaders, along with Yoweri Museveni of Uganda and Meles Zenawi of Ethiopia. The Anglo-French rivalry, a key to understanding the events in the region, is also omitted.

Collins instead in Rwanda 1994: The Myth of the Akazu Genocide Conspiracy and its Consequences, underscores that at the onset of the war the US gave diplomatic support to the outright lie that Ugandan President Yoweri Museveni had been taken by surprise when a large number of Rwandans serving in his army suddenly ‘defected’ and invaded Rwanda: They knew that Museveni had been in on the act. Instead of arresting the RPF fighters when they were driven back into Uganda, Museveni rearmed them and enabled them to use Uganda as their base until they were strong enough to establish a base inside Rwanda.

Journalist Helen E. Epstein in a 2017 article for The Guardian,  America’s secret role in the Rwandan genocide writes:Three and a half years before the genocide, a rebel army of mainly Rwandan Tutsi exiles known as the Rwandan Patriotic Front, or RPF, had invaded Rwanda and set up camps in the northern mountains. They had been armed and trained by neighboring Uganda, which continued to supply them throughout the ensuing civil war, in violation of the UN charter, Organization of African Unity rules, various Rwandan ceasefire and peace agreements, and the repeated promises of the Ugandan president, Yoweri Museveni.(…)“The US was monitoring Ugandan weapons shipments to the RPF in 1992, but instead of punishing Museveni, western donors including the US doubled aid to his government and allowed his defense spending to balloon to 48% of Uganda’s budget, compared with 13% for education and 5% for health, even as Aids was ravaging the country. In 1991, Uganda purchased 10 times more US weapons than in the preceding 40 years combined.

Epstein, despite reporting such damaging facts for US foreign policy in the region, still bafflingly depicts its policy as neutral or “looking on” and still calls the events a civil war instead of an outright international aggression. For example, former US Ambassador to Uganda R. E. Gribben in his 2005 memoir In the Aftermath of Genocide: The U.S. Role in Rwanda revealed that US intelligence was well aware about Museveni’s support for the RPF. “Gribbin confirms that the US had intelligence of Ugandan involvement and expressed admiration for Museveni’s ability to maintain ‘plausible deniability’ on the matter,” Barrie Collins writes in Rwanda 1994: The Myth of the Akazu Genocide Conspiracy and its Consequences.

Collins states that two key pieces of disinformation were disseminated and became internationally endorsed: the President’s plane had been shot down by members of the Akazu, a shadowy network of individuals close to the late President and the massacres of civilians that erupted the following day were the unfolding of a genocide that the Akazu had planned long in advance. Both of these narratives have since been debunked by countless historical research on released archival documents, as well as a vast documentation of over two decades of judicial trials at the ad hoc tribunal in Arusha, as well as trials in Spain, France or Canada. Collins underscores that the RPF talking points at the time eerily echo the same views of the US Clinton administration Assistant Secretary for Intelligence and Research T. Gati or the chief human rights official John Shattuck.

African Great Lakes expert Charles Onana, who has already published eight investigations on the regions recent history, plunges us in his recent Holocauste au Congo, L’omertà de la communauté international, La France complice ?(Holocaust in the Congo, The omertà of the international community, Is France a partner in crime?), into the years preceding and following the fall of Congolese President Mobutu Sese Seko with the invasion of the Zaire in 1996 by the Alliance of Democratic Forces for the Liberation of Congo (AFDL) and the setting up of a system of occupation which is still in place to this day.

Major events are reconstructed citing an impressive wide range of primary archival sources – spanning from US and French Presidential records, US national security agencies’ reports and memos, letters, congressional hearings, judicial trials, parliamentary inquiries and newspaper articles of the time- as well as interviews with key actors. Secondary sources are also widely cited, with a particular attention to a variety of less know emerging Congolese authors.

We learn that huge diplomatic pressure from the Clinton administration was asking Mobutu to step down as meetings between Mobutu and US Ambassador in Kinshasa Melissa Wells, as well as US ambassador to the United Nations Bill Richardsonare evoked: their bullying words violate diplomatic etiquette, recalling colonial power relationships. Mobutu and certain members of his entourage faced US visa restrictions in 1993 and he and his family were hit by a hefty demonization campaign orchestrated in the international press.

Masking the aggressors

Violent rebel incursions into eastern Congo since 1996 were justified throughout the years by the international community and many scholars and journalists on dubious arguments such as Rwanda needing to protect its territory from attacks by Hutu refugees in eastern Zaire or the need to protect a Congolese persecution of a historically unfounded Tutsi minority, known as Banyamulenge, in eastern Congo.”

Holocauste au Congo reveals that these two misleading narratives, although espoused by US and EU officials at the time, were not what their respective intelligence services were reporting to them: as early as September 1994 both French and US intelligence reports emphasized that the refugees in Zaire of the former Rwandan national army posed zero military threat to Rwanda; as early as November 1994 a report by the Bureau of Intelligence and Research of the US State Department predicted that the Rwandan Patriotic Front would bring conflict to eastern Zaire. An entire chapter is devoted to the controversial term Banyamulenge.

Most authoritative history books on the region state that eastern Congo was invaded so as “to disarm the Hutus in the refugee camps” and “protect the Banyamulenge”:  all cite the vice-governor of South Kivu, Lwabandji Lwasi Ngabo, as pronouncing xenophobic and dangerous statements against this Tutsi minority. Instead, Lwasi Ngabo actually said exactly the contrary: in South Kivu, on 8 October 1996 he announced the setting up of a humanitarian corridor to evacuate the Tutsi and other civilian populations who were not involved in the war of aggression which had just begun. Not one of the historians or journalists hasrectified this lie despite the fact that the mayor Lwasi Ngabo has since won a trial in Belgium providing the proof of what he had stated at the time, namely that he wanted to bring the population in a safe area, further away from the border and thus away from the war zone.

Most journalists and scholars reported the RPF talking points,rather than verify the facts on the ground, which camouflaged theinternational war of aggression.

Unfortunately, both these easily debunkable narratives, namely that “the FDLR (a group of Hutu refugees from 1994) are the main cause of instability in eastern Congo” and “the Banyamulenge must be protected in eastern Congo,live on today and are used as pretexts by Rwandan proxy rebellions for eastern Congo’s genocidal occupation.

“The FDLR are today in South Kivu mainly agriculturalists,” a testimony who prefers to remain anonymous tells me via phone in July 2023 “they do not pose a threat to our communities, but they do tell us they hope that one day they will be able to return home to Rwanda. It’s the Rwandan army which is the main threat today,via their proxy rebel movement M23. Even when civilian auto-defense groups managed to recently capture a high-level Rwandan official the UN mission remained silent, they did not denounce this foreign presence on Congolese territory.” This attitude of not identifying the perpetrators on the part of the UN mission is a huge disservice, to say the least, to its protection mandate. It also allows for impunity of those who have committed the international aggression.

A dark page in the history of the UN refugee agency, UNHCR, is its suppression of the Gersony report on the RPF crimes against humanity in Rwanda. Later the UN refugee agency breached the principle of non-refoulement (“no expulsion of refugees to a high-risk country”), the cornerstone of asylum and of international refugee law,  by pushing for a voluntary return of the nearly 2 million Hutu refugees (or a third of Rwanda’s population), who had fled the RPF advance, to Congo (then Zaire) at a time where all intelligence and NGO reports stated Hutus were often arrested and even killed when they returned home. UNHCR remainedsilent as Rwanda, while the US and other western countries also remained taciturn, bombed the Hutu refugee camps in eastern Zaire dispersing its population in 1996. They also remained silent as a sham liberation movement, the AFDL, chased and assassinated Hutu refugees for months on end throughout the Congo, as hundreds of thousands died. Today countless Rwandan witnesses who have survived have recounted this tragic journey. Worse, not having addressed the issue back then, it still remains a tragedy to this day.  

We learn from President Chirac’s Defense Minister at the time, Charles Million, who wrote the foreword of Holocauste au Congo, that Bill Clinton in person dissuaded France from launching a much-needed intervention force to protect the populations (the Hutu refugees and the Congolese civilians ) in eastern Congo.

Perhaps the most surprising evidence provided by Holocauste au Congo is breaking the myth that the United States and the west in general looked away from these two tragedies. The grounds often given are for example that Washington needed to seek risk-averse approaches to conflict intervention after the US military pulled out of Somalia, prompting what is known today as the ‘Somalia syndrome. This non-interventionist stance is instead a part of the very US propaganda, whose purpose was to obfuscate what was actually an international war by a US backedintervention.

The thoughts and perceptions of key US politicians which at the time dealt and developed policies on the crisis come to life through direct quotes taken straight from archival documents,  reports, letters and interviews: figures such as Bill Clinton, US President at the time;  Melissa Wells, US ambassador; Roger Winter, Executive Director of the U.S. Committee for Refugees and Immigrants; Anthony Lake, National Security Advisor, from 1993 to 1997 and  White House Special Envoy from 1998 to 2000, George Moose,  Assistant Secretary of State for African from 1993 to 1997 and ambassador to the UN agencies in Geneva from 1997 to 2001; William Perry, U.S. Defense Secretary;  Bill Richardson, US  Ambassador to the United Nations between 1997 and 1998; Susan Rice, National Security Council official from 1993 to 1997 (as director for international organizations and peacekeeping from 1993 to 1995, and as special assistant to the president and senior director for African affairs from 1995 to 1997)  and Assistant Secretary of State for African Affairs from 1997 to 2001; Thomas Pickering, Under Secretary of State for Political Affairs; Ambassador Richard Bogosian, Coordinator for Rwanda and Burundi are widely reproduced.

Many questions were raised at the time by US Congress members who were relentlessly asking for an explanation of the US military aide given to Rwanda, who was in turn invading Zaire. Holocauste au Congo brings to life these pertinent questions which have since then not been officially answered.

To what degree was the regime change which overthrew Mobutu orchestrated by members of the Clinton administration? We learn for example that Dennis Hankins, counsellor at the US embassy in Kinshasa from 1996 to 1998,  travelled with the AFDL rebels and updated US ambassador to the UN Bill Richardson regularly on their advance. Richardson confirms the close ties with the invading AFDL proxy rebellion in a US House International Relations Committee hearing on 5 November 1997.

A veil of silence

On 22 of July 1994 US President Clinton commenced a little-known relief mission, Operation Support Hope, as its contemporary French-led Opération Turquoise, which was authorized by the United Nations on 22 June 1994, was also deployed to secure the fleeing Rwandan population.

Intelligence memos, reports, memoires and interviews with key US and other protagonists at the time recall that the priority of Operation Support Hope was securing the new Tutsi-led regime in Kigali.

A testimony who participated in the operation reveals to Onana its intended secrecy: US soldiers were asked not to reveal their deployment destination to relatives. The complexity of its military build-up and the counterintelligence training it provided in Rwanda, as well as the high-level political participation in its meetings raise many questions over Operation Support Hope role in the region. Onana asks for example to what degree the United States Clinton administration  participated in the preparation of the regime change against Mobutu, since such a complex military operation requires, according to military experts, months of pre-planning.

US support -diplomatic, financial and miliary- of the minority Tutsi-led regime in Kigali did not recede when serious human rights abuses in Rwanda, as well as subsequently in Zaire, were denounced at the time by human rights and intelligence reports.

These crimes and acts of genocide are well documented today, for example Canadian journalist Judie Rever’s 2018 book In Praise of Blood for the RPF’s crimes in Rwanda and the UN Mapping report which was released in 2010 and covers the period 1993 to 2003 for human rights crimes committed in Zaire/RDC, as well as the numerous United Nations Group of Experts on the Democratic Republic of the Congo (DRC) reports published since 2001.Despite vast knowledge on the identity of the main perpetrators of the violence (such as warlords Jules Mutubetsi or Laurent Nkundaor today’s Senior Presidential Adviser on security in Rwanda James Kabarebe and President Paul Kagame) for two decades nowin Congo, a culture of impunity reigns at a national, regional and international level.

Today a veil of silence has settled over what was in 1996 the beginning of an outright recolonization of the Congo via proxy rebellions and the setting up of an occupational structure, via an army within an army imposed by disingenuous peace talks, an occupation which is in place to this day.

This silence may also be due to senseless censorship: two book launches of Holocauste au Congo as well as the film projection of Congo ! Le silence des crimes oubliés, (Congo! The silence of forgotten crimes) by film director Gilbert Balufu were cancelled in May and June 2023 in Paris. One event was to be held at the town hall of the 20ᵉ arrondissement and the other at the Institute of international and strategic relations, yet faced with political pressure by NGOs such as Survie or Network against antisemitism and all forms of racism (Réseau contre l’Antisémitisme et tous les Racismes ) the organizers had to seek an alternative venue at the last minute.

One NGO, Réseau contre l’Antisémitisme et tous les Racismes, subsequently even boasted about cancelling the conference on the Congolese genocide on twitter. Such misplaced activism is difficult to understand. Especially in light of the physical protection needed for writers such as Judie Rever who even risks her life for her research:  she recalls how the Belgian secret services approached her in her hotel lobby in 2014: “My name is Denis Ledure. I am the head of the Close Protection Services,” a branch of the Belgian Secret Service “I am here because we have reason to believe that the Rwandan Embassy in Brussels constitutes a threat to your security.” Charles Onana is currentlyfacing a trail in France begun by three ONGs for “genocide denial” for his research work on the Opération Turquoise which was the subject of his PhD achieved in 2017 at the University of Lyon. Researchers and scholars should not have to live such disconcerting experiences and NGOs should rather focus on targeting human rights criminals and not those who try and denounce them.

It is unfortunate that the two sides of varying viewpoints on the African Great Lakes region recent history cannot be openly debated, and that one side, the one pushing the dominant and by now an institutionalized narrative, recurs to smear campaigns and juridical attacks, rather than hold open discussions on evidence and facts. This attitude does a huge disservice to those who are trying to understand the origins and structure of the violence, asone way to halt it.

Historian, journalist, and author Vijay Prashad speaking about the release of his book published in 2020 Washington Bullets: A History of the CIA, Coups, and Assassinations says he wrote the book as he was outraged following the US sponsored coup against indigenous leader Evo Morales of Bolivia, as he deplores the political void in which today’s young generation is imbued and feels intellectuals and writers have done a very bad job at reminding the next generation on the ceaseless, punctual coup d‘état’s which the US and its allies have orchestrated world-widesince World War II. Prashad feels there is a deficit in western culture which has managed somehow to avoid digesting the easily available facts about the diabolical nature of such regime changes. One should be outraged, yet western culture isn’t, it’s rather aculture which legitimizes war criminals despite being aware of their crimes, which according to Prashad, is a major problem that needs to be understood, denounced and tackled.

On what legal basis does the US back a regime which came to power by invading a country and thus provoking a genocide and subsequently invading another country for a quarter of a century? 500,000 women have been raped in eastern Congo since 1996 as world-renowned gynecologist, human rights activist and Nobel Peace Prize laureate Dr Denis Mukwege has relentlessly testified, yet no major NGOs are lobbying daily that this violence and dehumanization stop? And after a quarter of a century and millions of deaths how can so many people who served in the Clinton administration still remain silent? Where is the outrage?

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